Des débats houleux à prévoir à l'Assemblée autour du budget de la Sécurité sociale
© Alexis Jumeau/ABACA
Les députés se penchent depuis le 28 octobre sur l'examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS). Plusieurs points risquent de susciter des passes d'armes, parmi lesquels le remboursement des consultations ou encore les allègements de charges.
Quinze milliards d'euros d'économies sont prévus par le gouvernement dans son projet de loi de financement de la sécurité sociale. Et il y a fort à parier que les débats seront électriques, tant les points cristallisant les tensions politiques sont nombreux. Vendredi, la commission des affaires sociales composée de députés de tous bords, a d'ailleurs rejeté le PLFSS. Ce lundi, les députés vont donc repartir de zéro dans le cadre des discussions en séance plénière. Ce PLFSS, Michel Barnier l'a construit en priorisant une hausse de 18 milliards d'euros des dépenses de sécurité sociale en 2025. Soit une augmentation de 2,7 %, a calculé Le Parisien. Un chiffre supérieur à l'inflation (1,8 %) mais très inférieur aux 5,3 % de 2024. De la gauche à la droite de l'échiquier politique français, les députés vont devoir trouver un terrain d'entente pour arriver à un vote du texte. La chose s'annonce compliquée.
Sur la table des débats : retraites et allègements de charges
Le Parisien a listé les points qui s'annoncent particulièrement litigieux. La désindexation temporaire des retraites, d'abord, qui si elle semble faire l'unanimité contre elle, pourrait provoquer quelques crispations. Car malgré un accord de façade des parlementaires qui se disent opposés au gel de six mois (souhaité par le gouvernement pour récupérer 4 milliards d’euros), en off, certains n'auraient rien contre. Le Parisien cite un parlementaire anonyme : "Personne ne le dira à visage découvert. Ça serait du suicide politique. On ne s’attaque pas à la classe d’âge la plus assidue aux urnes".
Autre motif de désaccord : les allègements de charges. Quatre milliards d'euros d'économie sont espérés par le biais d'une nouvelle répartition des allégements de charges sur les salaires pour les employeurs. Cette répartition prévoit notamment la diminution du taux maximal d’exonération au niveau du smic. Les macronistes, eux, étaient pour repenser la distribution d’une partie des 75 milliards d’euros de baisse de cotisations afin de tirer les salaires vers le haut, sans toucher à l’enveloppe globale.
Troisième sujet pointé : la hausse du ticket modérateur sur les consultations. Actuellement, la part prise en charge par la Sécurité sociale pour les consultations s’élève à 70 %, le gouvernement envisage de la faire tomber à 60 %, et donc de porter celle des mutuelles à 40 %. Économie espérée : 1,1 milliard d’euros. "Sur le volet santé, nous sommes déficitaires", pointe un patron de complémentaire santé. "Et on nous sort cette mesure du chapeau sans concertation alors que les appels à cotisations pour 2025 sont déjà partis".
Les taxes sur le sucre et l'alcool ne font pas l'unanimité au sein du gouvernement
Les arrêts maladie moins bien indemnisés sont aussi sur la table. Alors qu’aujourd’hui, à partir du 4e jour pour un salarié du privé, l’Assurance maladie prend en charge le salaire à hauteur de 50 % du salaire brut dans la limite de 1,8 smic (complété par l’employeur jusqu’à 90 % les 30 premiers jours), le gouvernement prévoit de descendre ce plafond à 1,4 smic. Cette mesure induirait une baisse de la somme versée par la Sécu pour les salariés gagnant plus de 1,4 smic, l’indemnité journalière maximum passant de 52 euros à 40 euros brut. Les entreprises et organismes de prévoyance vont devoir compenser les 600 millions d’euros annuels économisés par l’Assurance maladie. Parallèlement à cela, le gouvernement souhaite aligner le régime des arrêts maladie de la fonction publique sur celui du privé avec le passage de 1 à 3 jours de carence, et limiter le remboursement des congés maladie à 90 % du salaire pour les arrêts de trois jours à trois mois.
Enfin, les taxes sur le sucre et l’alcool susciteront également les débats à l'Assemblée. Au niveau ministériel, les premiers désaccords s'affichent déjà. Les ministres de la Santé et des Comptes publics y sont favorables. Pas le ministre de l’Agriculture, pour qui ces nouveaux prélèvements vont attiser la colère déjà vivace des agriculteurs et viticulteurs.
Comme le rappelle Le Parisien, l’ensemble des dépenses sociales dont celles de la Sécu représentent en France 57 % du produit intérieur brut quand la moyenne européenne s’établit à 48 %. Soit environ 260 milliards d’euros d’écart.
publié le 28 octobre à 15h54, Sabrina Guintini, 6Médias