Faits divers

Mort de Steve: une peine de principe requise à l'encontre du commissaire Chassaing

  • Des policiers devant une fresque murale en hommage à Steve Maia Canico, décédé lors de la Fête de la musique à Nantes en 2019, à l'occasion du troisième anniversaire de sa mort, le 21 juin 2022 à Nantes
    ©Loic VENANCE, AFP - Des policiers devant une fresque murale en hommage à Steve Maia Canico, décédé lors de la Fête de la musique à Nantes en 2019, à l'occasion du troisième anniversaire de sa mort, le 21 juin 2022 à Nantes
  • Des policiers devant une fresque murale en hommage à Steve Maia Canico, décédé lors de la Fête de la musique à Nantes en 2019, à l'occasion du troisième anniversaire de sa mort, le 21 juin 2022 à Nantes
    ©Benoit PEYRUCQ, AFP - Croquis d'audience, le 10 juin 2024 au tribunal de Rennes, du commissaire Grégoire Chassaing (c), jugé pour l'homicide involontaire de Steve Maia Caniço mort noyé lors de la Fête de la musique à Nantes en juin 2019
  • Des policiers devant une fresque murale en hommage à Steve Maia Canico, décédé lors de la Fête de la musique à Nantes en 2019, à l'occasion du troisième anniversaire de sa mort, le 21 juin 2022 à Nantes
    ©LOU BENOIST, AFP - Une affiche "procès correctionnel" Steve Maia Caniço à l'entrée de la salle d'audience du tribunal de Rennes, le 10 juin 2024

Le procureur de la République de Rennes a requis jeudi une "peine de principe", sans quantum, à l'encontre du commissaire Grégoire Chassaing, jugé pour l'homicide involontaire de Steve Maia Caniço mort noyé lors de la Fête de la musique à Nantes en juin 2019.

"M. Chassaing n'est ni un lampiste ni un bouc émissaire. Il est d'évidence celui qui a conduit une action collective, laquelle a créé la situation qui a abouti in fine au décès de Steve", a déclaré Philippe Astruc, demandant que le fonctionnaire soit "déclaré coupable".

Le ministère public a toutefois trouvé des circonstances atténuantes au commissaire qui était chargé de la sécurisation du site et dont les effectifs ont lancé d'eux-mêmes une dizaine de grenades lacrymogènes, en réaction à des jets de projectiles, provoquant la chute dans la Loire de cinq personnes, dont Steve, qui ne savait pas nager.

"Si le commissaire divisionnaire Chassaing est seul à comparaitre aujourd'hui, il est donc loin d'être le seul dont l'éventuelle responsabilité a été examinée, neuf personnes physiques ou morales ayant été attraites au dossier. Je comprends cependant parfaitement le sentiment qui peut être le sien de se trouver bien seul sur le banc des prévenus, ce qui n'était pas l'option défendue par le ministère public", a rappelé M. Astruc.

Le matin, le commissaire avait expliqué ne pas comprendre pourquoi il était le seul à comparaître. Plusieurs personnalités avaient été placées sous le statut de témoin assisté ou mises en examen lors de l'enquête, dont le préfet et la maire de Nantes, avant de bénéficier d'un non-lieu.

"Me retrouver seul à la barre alors que des témoignages ont montré qu'il y a d'autres responsabilités et que d'autres auraient pu se retrouver à cette barre, c'est très dur à vivre", a déclaré Grégoire Chassaing, 54 ans, désormais chef de la circonscription de Lyon.

Mercredi, il a été soutenu par le directeur général de la police nationale Frédéric Veaux qui est venu à la barre dresser un portrait élogieux du fonctionnaire.

Lors de son réquisitoire, Philippe Astruc a estimé que la noyade de l'animateur périscolaire de 24 ans était "la résultante finale d'une suite de plusieurs éléments indépendants les uns des autres mais qui, par leur enchaînement singulier le 22 juin 2019, a conduit au drame".

Il a ainsi listé "le choix d'un site singulier et manifestement dangereux" en bordure de Loire avec une hauteur de quai de six mètres, la "décision d'un DJ d'outrepasser l'ordre donné d'arrêter la musique" qui porte une "responsabilité morale" dans le drame.

Puis, il y a eu "l'action violente" d'un groupe de teufeurs mécontents jetant des projectiles sur des forces de l'ordre qui a provoqué "l'action de la police qui a utilisé des gaz lacrymogènes" envahissant le quai, conduisant à la chute dans l'eau de teufeurs désorientés par le nuage de gaz.

Enfin dans cette chaîne de causalité figure le fait que Steve, qui avait la phobie de l'eau, ne savait pas nager, ainsi que "l'opacité" de la Loire qui a empêché une assistance rapide des secours nautiques.

- "démonstration forte" -

En accord avec le rapport de l'Inspection générale de l'administration (IGA), le vice-procureur Tanguy Courroye a lui relevé le "manque de discernement" du commissaire.

"L'usage des armes par les effectifs de M. Chassaing n'est, ni absolument nécessaire, ni strictement proportionné. Je ne crois pas qu'il est entendable de voir un quai Wilson saturé de gaz lacrymogènes", a dit M. Courroye.

Me Cécile De Oliveira, avocate de la famille Maia Caniço, a reconnu que le fait de ne pas prononcer de réquisition avec une peine déterminée était assez "inhabituel".

"Nos clients avaient besoin de ce soutien fort du principe de culpabilité, de cette démonstration forte des responsabilités de Grégoire Chassaing", a salué l'autre conseil de la famille, Me William Pineau.

Le procureur a également rappelé que la mort de Steve avait été un "drame national". Les circonstances de son décès avaient alimenté le débat sur les violences policières en France.

Vendredi le procès doit s'achever avec la plaidoirie de la défense. Le jugement devrait être ensuite mis en délibéré.

Le commissaire Chassaing encourt une peine maximale de trois ans d'emprisonnement et 45.000 euros d'amende.

publié le 14 juin à 12h24, AFP

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