Migrants: décès d'un Syrien dans la Manche, marche de soutien à Calais
© BERNARD BARRON, AFP - Des gilets de sauvetage, des bouées et un bateau pneumatique dégonflé sur la plage de Sangatte, près de Calais, après une tentative infructueuse de migrants de traverser illégalement la Manche pour rejoindre la Grande-Bretagne, le 4 décembre 2024
Quelques heures après le décès samedi d'un migrant syrien qui tentait de traverser la Manche, une marche pour dénoncer la politique sécuritaire "mortifère" à la frontière franco-britannique a réuni plusieurs centaines de personnes à Calais, a constaté un correspondant de l'AFP.
La mort de ce Syrien, tôt samedi matin à Sangatte (Pas-de-Calais), est le "premier décès en mer en 2025" à la frontière franco-britannique, selon la préfecture du département.
Ce jeune homme de 19 ans faisait partie d'une soixantaine de passagers d'une embarcation précaire ("small boat"), qui a échoué à traverser la Manche peu après son départ vers 04H10 du matin, a rapporté le procureur de Boulogne-sur-Mer Guirec Le Bras, interrogé par l'AFP.
Il a été retrouvé sur le sol de l'embarcation au retour sur le rivage, "probablement écrasé" par d'autres migrants dans la cohue du départ, selon la préfecture.
Un homme né en Syrie, âgé de 33 ans, a été "interpellé et placé en garde à vue comme ayant pu organiser le départ", a ajouté M. Le Bras.
"Cette nouvelle tragédie souligne les terribles dangers que représentent les traversées en petits bateaux, et nous continuons de faire tout notre possible pour les empêcher", a réagi samedi un porte-parole du gouvernement britannique.
Londres a de nouveau pointé du doigt les passeurs, "ces criminels" qui "ne se soucient que du profit, pas des vies qu'ils mettent en danger".
- "Situation indigne" -
Mais les 500 à 600 participants d'une marche "pour la justice et la dignité" qui s'est déroulée samedi après-midi à Calais, à l'initiative de nombreuses associations d'aide aux migrants, de syndicats et de représentants politiques de gauche et d'extrême-gauche, l'entendaient d'une autre oreille.
"Nos mers se transforment en cimetières, et c'est une situation indigne qui n'est pas conforme aux valeurs de l'Union européenne mais aussi aux valeurs de la France" a déclaré à l'AFP Majdouline Sbaï, députée européenne EELV présente dans le cortège.
La France "a créé des lois d'inhospitalité qui visent à rendre hostile notre territoire, et qui en sécurisant davantage les frontières, précipitent les gens vers la mort", a-t-elle estimé.
Les "politiques répressives" à la frontière franco-britannique forcent les migrants à prendre toujours plus de risques pour tenter la traversée, selon leurs soutiens.
Dans la manifestation qui a eu lieu dans le calme, un groupe d'exilés portait un cercueil noir recouvert de fleurs, et d'autres manifestants une grande banderole affichant les noms de migrants décédés durant leur dangereux périple vers l'Angleterre ces dernières années.
Selon un dernier bilan de la préfecture du Pas-de-Calais, 77 migrants sont morts en 2024 en tentant de rejoindre l'Angleterre à bord de "small boats". Un record depuis l'utilisation depuis le début en 2018 de l'usage de ce moyen de traversée dans le détroit du Pas-de-Calais.
L'an dernier, 36.816 candidats à l'exil sont parvenus à rejoindre l'Angleterre sur des small boats, soit 25% de plus qu'en 2023, selon le ministère britannique de l'Intérieur.
Cette hausse accroît la pression sur le gouvernement travailliste de Keir Starmer, alors que la baisse de l'immigration, légale comme illégale, a été l'un des enjeux majeurs de la campagne électorale l'ayant porté au pouvoir en juillet, qui a aussi vu la percée du parti anti-immigration Reform UK de Nigel Farage.
Selon Downing Street, les traversées de la Manche par "small boats" ont été l'un des sujets évoqués par Keir Starmer et le président français, Emmanuel Macron, lors de leur rencontre jeudi soir à Chequers, résidence de campagne des Premiers ministres britanniques.
publié le 11 janvier à 17h06, AFP