Nouveau gouvernement

Retailleau/Darmanin: deux présidentiables de droite sur la même ligne sécuritaire

  • Gérald Darmanin et Bruno Retailleau lors des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale le 15 octobre 2024
    ©ALAIN JOCARD, AFP - Gérald Darmanin et Bruno Retailleau lors des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale le 15 octobre 2024
  • Gérald Darmanin et Bruno Retailleau lors des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale le 15 octobre 2024
    ©JULIEN DE ROSA, AFP - Gérald Darmanin, Maud Bregeon et Bruno Retailleau lors des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale le 3 décembre 2024

Pour la première fois dans l'histoire récente de la Ve République, les ministres de l'Intérieur et de la Justice sont au diapason, mais les ambitions présidentielles de Bruno Retailleau et Gérald Darmanin pourraient déboucher sur une compétition mortifère pour l'un et l'autre.

"Ils ne s'adorent pas, mais ils ne veulent pas s'embêter l'un l'autre", estime un ancien ministre d'Emmanuel Macron car, dit-il, "ils sont convaincus tous les deux qu'en matière régalienne, il faut de la fermeté".

"Ce sont deux grands fauves de la politique qui ont des visions assez proches de ce que doit être le continuum de sécurité", note une ministre du gouvernement Bayrou.

"Avec eux, la chaîne pénale va être cohérente. C'est un binôme très complémentaire avec un intérêt commun: incarner la sécurité", relève pour sa part Franck Louvrier, ancien conseiller de Nicolas Sarkozy à l’Élysée.

Il considère que la "concurrence entre ces deux profils de présidentiables va être annihilée car l'un ne peut pas réussir sans l'autre". Il estime même que le tandem peut "être solide malgré les vicissitudes du gouvernement, pour peu qu'il parvienne à installer l'idée dans l'opinion qu'il représente la sécurité".

De prime abord, tout oppose les deux hommes, hormis leur antienne sur la sécurité et l'ordre. Ils ne sont pas de la même génération, Bruno Retailleau, 64 ans, pourrait être le père de Gérald Darmanin, 42 ans. Tous deux sont certes de droite et le revendiquent, mais le premier est resté à LR et était proche de François Fillon quand le second dont le mentor était Nicolas Sarkozy a quitté le parti pour rejoindre Emmanuel Macron en 2017.

- "Petites phrases" -

"Retailleau est un conservateur, cultivé, beaucoup plus que Darmanin. Il est intellectuellement très affûté", décrit un responsable socialiste, grand connaisseur des arcanes gouvernementales et parlementaires.

Il estime que l'ex-patron du groupe LR au Sénat est très différent de son cadet par sa manière de faire: "Il a des convictions, mais il n'est pas sans foi ni loi, il ne fait pas des coups dans le dos alors que Gérald Darmanin est plus opportuniste".

Avant la dissolution et son entrée au gouvernement de Michel Barnier début septembre comme ministre de l'Intérieur, le sénateur vendéen n'était pas connu pour avoir des ambitions présidentielles.

Mais dès son arrivée place Beauvau, il a "fait du Sarko en terme de com'", selon un parlementaire de gauche, multipliant les formules choc ("mexicanisation du pays") et les postures martiales, disant souhaiter "frapper la délinquance au cœur et en profondeur".

En cela, selon la ministre du gouvernement Bayrou, il n'y a pas de différence entre eux. "Les deux sont adeptes des petites phrases", dit-elle.

À son arrivée place Beauvau, Bruno Retailleau avait laissé poindre une envie de tacler son prédécesseur. Devant un Gérald Darmanin impassible, il avait répété à trois reprises que sa feuille de route était de "rétablir l'ordre", sous-entendant que cela n'avait pas été le cas auparavant.

Trois mois plus tard, les voici ensemble avec une ambition commune: venir à bout du narcotrafic avec son lot de meurtres. Chacun a proclamé sa détermination dans ce domaine. "Le risque est plus grand pour Bruno Retailleau. Si les résultats ne sont pas au niveau de ses paroles, ce sera un problème pour lui. Pour Gérald Darmanin, la difficulté de la tâche est moindre. On attend toujours davantage de la police", souligne le responsable socialiste.

Bruno Retailleau et Gérald Darmanin ont déjeuné lundi ensemble pour la première fois depuis l'annonce du nouveau gouvernement. "C'était un déjeuner de travail extrêmement constructif qui leur a permis de travailler ensemble. Ils ont abordé plusieurs dossiers dont la proposition de loi sénatoriale contre le narcotrafic", a commenté auprès de l'AFP l'entourage du garde des Sceaux, assurant qu'il n'y avait "pas du tout" de rivalité entre les deux hommes.

publié le 6 janvier à 18h40, AFP

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