Soupçons d'"acte terroriste" après la tentative d'attaque à Brasilia
La tentative d'attaque à l'explosif contre la Cour suprême à Brasilia est traitée comme un possible "acte terroriste", ont annoncé jeudi les enquêteurs, au lendemain de cet événement qui met le Brésil sous tension à quelques jours d'un sommet du G20.
Mercredi soir, un homme portant des explosifs est mort après avoir tenté en vain d'entrer dans le bâtiment de la plus haute juridiction du pays. Il n'y a pas eu de blessé.
Ce bâtiment se trouve sur la place des Trois-Pouvoirs, coeur de la démocratie brésilienne, où il fait face au palais présidentiel et au Parlement.
Les enquêteurs travaillent sur deux pistes qui ne s'excluent pas l'une l'autre : celles d'un "acte terroriste" et d'une tentative d'"abolition violente de l'état de droit", a indiqué en conférence de presse le directeur général de la Police fédérale, Andrei Rodrigues.
La police a identifié l'assaillant, aux motivations encore inconnues, comme Francisco Wanderley Luiz. Lors d'élections locales en 2020, il avait été candidat au poste de conseiller municipal sous les couleurs du Parti libéral de Jair Bolsonaro, président d'extrême droite alors au pouvoir.
Le camp Bolsonaro a évoqué un "fait isolé" dû à un "fou".
Sur le réseau social X, l'ancien chef d'État a publié un message d'apaisement, un registre inhabituel pour lui, prônant "dialogue" et "union".
"Je lance un appel à tous les courants politiques et aux dirigeants des institutions nationales pour que, en ce moment de tragédie, ils prennent les mesures nécessaires pour avancer vers la pacification nationale", a-t-il écrit.
Selon le patron de la Police fédérale, les premiers éléments de l'enquête font état d'indices d'une "préparation à long terme" de cet "acte individuel" et de possibles "liens" avec les émeutes bolsonaristes contre les sièges de l'exécutif, du législatif et du judiciaire sur la même place de la capitale en janvier 2023.
"Ce n'est pas un fait isolé", a-t-il lancé.
L'attaque manquée s'inscrit en outre dans un contexte particulièrement fort: le président de gauche Luiz Inacio Lula da Silva accueille lundi et mardi un sommet du G20 à Rio de Janeiro, puis mercredi le président chinois Xi Jinping en visite d'Etat à Brasilia.
Lula ne se trouvait pas au palais présidentiel au moment des explosions. Il y a reçu jeudi matin plusieurs ambassadeurs, qui sont entrés par un accès latéral et non par la rampe principale, a constaté un photographe de l'AFP.
- Explosifs dans une maison -
Le vice-président brésilien Geraldo Alckmin, qui se trouve pour la COP29 à Bakou, en Azerbaïdjan, a qualifié les faits de "tristes" et "graves" et réclamé que l'enquête soit "extrêmement rapide et rigoureuse".
"C'est un attentat contre une institution de la République, le pouvoir de la République", a-t-il affirmé.
Les forces de sécurité ont trouvé d'autres explosifs de fabrication "artisanale" dans une maison où vivait l'assaillant présumé, dans la zone ouest de la capitale, a révélé Andrei Passos Rodrigues.
Il a ajouté qu'un "lance-flammes" de fabrication artisanale avait été retrouvé près du corps de l'assaillant.
Mercredi soir, deux détonations se sont produites dans un bref laps de temps, vers 19H30 (22H30 GMT).
Il y a d'abord eu une première explosion, celle d'une voiture qui se trouvait sur un parking proche du Parlement, et dont est sorti précipitamment l'assaillant.
Puis "cet individu s'est approché du Tribunal suprême fédéral, a essayé d'entrer, n'y est pas parvenu et l'explosion s'est produite devant la porte", a raconté mercredi soir devant la presse la vice-gouverneure de Brasilia, Celina Leao.
- "Impunité" -
Le 8 janvier 2023, une semaine après le retour de Lula au pouvoir, des milliers de partisans de Jair Bolsonaro, défait au scrutin présidentiel de la fin 2022, avaient pris d'assaut et saccagé les sièges des institutions sur la place des Trois-Pouvoirs.
Alexandre de Moraes, un puissant juge de la Cour suprême, conduit les investigations sur cette présumée tentative de coup d'État, dont le spectacle avait rappelé l'assaut du Capitole par des partisans de Donald Trump le 6 janvier 2021 aux États-Unis.
"Il faut non seulement s'unir pour la défense de la démocratie, mais aussi pour la responsabilisation de ceux qui lui ont porté atteinte, car l'impunité finit par provoquer des événements comme celui d'hier", a déclaré jeudi ce magistrat. Il est désormais chargé aussi de l'enquête sur la tentative d'attaque.
publié le 14 novembre à 18h37, AFP