Kelyan, 14 ans, mort poignardé à Londres et symbole de l'emprise des gangs
© -, AFP - Cette photo, distribuée par la police de Londres le 9 janvier 2025, représente Kelyan Bokassa, mort poignardé à 14 ans
Kelyan Bokassa, un adolescent de 14 ans mort poignardé mardi en plein après-midi dans un bus londonien, est devenu le nouveau visage de l'emprise des gangs sur certains jeunes Britanniques, qui alimentent le fléau des violences à l'arme blanche dans le pays.
La fin tragique de ce jeune garçon, dont le sourire s'affiche jeudi sur les photos publiées par les médias britanniques, est la conséquence, à en croire sa mère, de difficultés et de mauvaises rencontres. L'adolescent a été déscolarisé à plusieurs reprises et a même vécu un temps dans la rue.
"Mon esprit n'était jamais tranquille lorsqu'il quittait la maison. Ce n'est pas facile de voir votre enfant sortir et ne pas savoir s'il va rentrer", a ainsi raconté Marie Bokassa au journal The Times.
Kelyan a été poignardé mardi alors qu'il se trouvait dans un bus dans le quartier de Woolwich, connu comme un lieu d'activité de bandes criminelles. Les secours appelés sur les lieux n'ont pu le sauver.
"Chaque fois que je vais à Woolwich, j'entends dire que la police enquête sur une agression à l'arme blanche. Et quand la police est arrivée (chez elle), je me suis dis +c'est mon tour+", raconte encore sa mère.
La veille, un jeune homme de 18 ans avait été grièvement blessé d'un coup de couteau près d'une école du même quartier et, en septembre, un adolescent y était mort poignardé, dans ce que le procureur a qualifié de "représailles" liées à "une guerre de territoire".
- "Enfants vulnérables" -
Dans le cas de Kelyan, le mobile n'est pas encore connu. Des témoins ont dit avoir vu deux jeunes, l'un d'eux armé d'une machette, fuir les lieux de l'agression.
Avant même ses dix ans, Kelyan avait été trouvé à l'école avec un couteau, et plus récemment une machette. Il devait comparaître bientôt devant la justice pour "possession d'une arme offensive dans l'espace public".
Fan de football et rappeur amateur, Kelyan vivait seul avec sa mère à Greenwich, quartier voisin de Woolwich. Mais il avait été un temps placé par les services sociaux.
C'est à ce moment là, selon elle, qu'il a commencé à sécher l'école, à être "exposé à la drogue et à avoir des tatouages... Il avait douze ou treize ans".
Environ 27.000 jeunes entre 10 et 17 ans étaient identifiés en 2017 comme membres d'un gang de rue en Angleterre et au Pays de Galles, selon des chiffres publiés dans un récent rapport du ministère de la Justice.
Ces bandes criminelles "ciblent les enfants vulnérables", notamment ceux "ayant souffert d'abus, de négligence ou de traumatisme dans leur famille". Elles attirent ces jeunes en leur promettant "de l'amitié, du sens, un but et une appartenance", mais aussi "protection, sécurité, de l'argent et des cadeaux", lorsqu'elles sont liées au trafic de drogue par exemple, décrivait ce rapport.
- "Cercle vicieux" de la violence -
L'an dernier, dix adolescents sont morts poignardés à Londres (18 en 2023), selon des chiffres de la police.
Mercredi, un jeune de 17 ans est mort poignardé, après avoir été agressé par plusieurs individus à Bedford (nord de Londres), a annoncé par ailleurs jeudi la police.
Lors d'un service religieux en hommage à Kelyan mercredi soir, le militant Faron Paul a appelé à davantage de moyens pour protéger les jeunes du "cercle vicieux" de la violence. "Ces garçons sont vraiment jeunes et cela provoque des effets à long terme, avec d'autres qui tentent de se venger", a-t-il affirmé.
"Les parents disent avoir besoin d'aide pour leur enfant, il a un couteau, il est impliqué dans un gang (...) mais parce que rien ne s'est encore vraiment passé, leur cas n'est pas jugé assez important", regrette auprès de l'AFP Alison Cope, dont le fils, Joshua, a été tué en 2013 et qui se bat pour sensibiliser les jeunes sur le fléau des armes blanches.
Il y a deux ans, Kelyan était revenu vivre avec sa mère et était retourné à l'école depuis peu, mais "il avait toujours un pied dans la rue", a-t-elle reconnu auprès de la BBC, assurant avoir "essayé tellement, tellement de fois" de le sortir de cette emprise, sans avoir reçu beaucoup d'aide des pouvoirs publics.
publié le 9 janvier à 18h30, AFP