Monde

Thaïlande: les familles des victimes d'un massacre réclament justice alors que le délai d'inculpation expire

  • Des manifestantes brandissent les noms des victimes du
    ©Madaree TOHLALA, AFP - Des manifestantes brandissent les noms des victimes du "massacre de Tak Bai" au cours duquel de nombreux manifestants musulmans ont étouffé dans des camions militaires. Photo le 15 octobre 2024 à Narathiwat en Thaïlande
  • Des manifestantes brandissent les noms des victimes du
    ©Madaree TOHLALA, AFP - Paridah Toleh, mère de Saroj Toleh, victime du "massacre de Tak Bai" d'octobre 2004 au cours duquel de nombreux manifestants musulmans ont étouffé dans des camions militaires, montre des photos de son fils dans un vieil album dans la province méridionale de Narathiwat en Thaïlande. Photo 24 octobre 2024.
  • Des manifestantes brandissent les noms des victimes du
    ©Madaree TOHLALA, AFP - Le survivant Maliki Doloh, blessé en octobre 2004 lors du "massacre de Tak Bai", au cours duquel de nombreux manifestants musulmans ont étouffé dans des camions de l'armée thaïlandaise, montre les blessures à ses bras et à ses mains. Photo à Narathiwat, dans le sud de la Thaïlande, le 25 octobre 2024.
  • Des manifestantes brandissent les noms des victimes du
    ©Madaree TOHLALA, AFP - Des membres de la communauté musulmane prient devant une fosse commune pour les victimes de l'incident d'octobre 2004 connu sous le nom de "massacre de Tak Bai" lorsque des dizaines de manifestants musulmans ont étouffé dans des camions de l'armée thaïlandaise. Photo dans un cimetière de Narathiwat, dans le sud de la Thaïlande, le 25 octobre 2024.

Les familles des 78 personnes mortes étouffées dans des camions de l'armée thaïlandaise se sont jointes vendredi aux survivants pour exprimer leur colère face au fait que les responsables ne seront jamais traduits en justice.

Vendredi marque le 20e anniversaire du "massacre de Tak Bai" mais aussi le jour de l'expiration du délai de prescription, ce qui entraînera l'abandon des accusations de meurtre portées à l'encontre de sept suspects.

Ce massacre est le symbole de pour les organisations des droits de l'homme de l'impunité de l'État dans les provinces méridionales en majorité musulmanes où se déroule depuis des années une insurrection opposant les forces gouvernementales aux combattants réclamant une plus grande autonomie.

"Il n'existe pas de justice dans notre pays", a déclaré à l'AFP Khalija Musa, dont le frère Sari a été tué à Tak Bai.

"Nous ne sommes pas égaux. Nous, les habitants des provinces les plus méridionales, ne faisons pas partie de la famille (thaïlandaise). Nos voix ne sont tout simplement pas assez fortes", a-t-elle ajouté.

L'immense majorité des Thaïlandais sont bouddhistes et seule une petite minorité d'entre eux est musulmane

Une centaine de proches et des survivants ont prié vendredi matin dans un cimetière de la province de Narathiwat devant une fosse commune à la mémoire des victimes de Tak Bai.

La Première ministre Paetongtarn Shinawatra – dont le père Thaksin était le chef du gouvernement au moment du massacre – a présenté des excuses jeudi mais assuré qu'il n'était pas possible de prolonger le délai de prescription.

La Société civile pour la paix, qui regroupe les survivants et les familles des victimes, a exhorté le gouvernement à constituer une commission d'enquête indépendante avec des experts internationaux.

"Ce qui s'est passé au moment de la tragédie de Tak Bai (...) est un crime contre l'humanité", a-t-elle déclaré dans un communiqué.

- "Extrêmement alarmés" -

Les forces de sécurité avaient alors ouvert le feu sur des manifestants devant un commissariat de police de Tak Bai, dans la province de Narathiwat, tuant sept personnes.

Puis 78 personnes étaient mortes étouffées après avoir été arrêtées et empilées à l'arrière de camions militaires thaïlandais, face contre terre, les mains liées dans le dos.

En août, un tribunal provincial avait accepté une plainte pénale déposée par les familles des victimes contre sept responsables, une décision qu'Amnesty International avait qualifiée de "premier pas crucial vers la justice".

Mais les responsables de ce drame ont évité de comparaître devant le tribunal, empêchant ainsi l'affaire de progresser.

Lundi, cette juridiction devrait officiellement mettre fin à cette affaire dans une région régie par des lois d'urgence.

Aucun membre des forces de sécurité n'a jamais été emprisonné pour exécutions extrajudiciaires ou tortures dans le sud de la Thaïlande malgré des années d'allégations d'abus.

Ce conflit a fait plus de 7.000 morts depuis janvier 2004.

Les experts des droits de l'homme de l'ONU se sont dits "extrêmement alarmés" par le fait que l'affaire se termine ainsi.

"Le fait de ne pas traduire les auteurs en justice constitue une violation des obligations de la Thaïlande en matière de droits de l'homme", ont déclaré jeudi ces experts dans un communiqué.

publié le 25 octobre à 16h05, AFP

Liens commerciaux