Mozambique: réseaux sociaux en panne, après des appels à manifester
La capitale du Mozambique avait des allures de ville fantôme jeudi et l'accès aux réseaux sociaux était interrompu, alors que l'opposition appelle à de nouvelles manifestations pour contester les résultats électoraux, face à des autorités qui ont promis de réprimer tout dérapage.
Les artères de Maputo, intensément embouteillées d'habitude, étaient désertes et nombre de commerces fermés pour la troisième fois depuis dix jours, a constaté l'AFP.
L'accès à la messagerie Whatsapp mais aussi à Facebook et Instagram, plateformes utilisées régulièrement par le chef de l'opposition Venancio Mondlane pour appeler à manifester et motiver ses troupes, était fermé, a confirmé à l'AFP le service de surveillance d'internet Netblocks.
Des correspondants de l'AFP avaient constaté ces pannes dès le début de la matinée. "Nous pouvons confirmer que des restrictions sur les réseaux sociaux ont été imposées au Mozambique", a ensuite expliqué Netblocks, basé à Londres.
Vendredi dernier, le pays avait déjà connu une panne générale d'internet chez les différents opérateurs mobiles, qui avait duré plusieurs heures, au lendemain de l'annonce des résultats officiels des élections présidentielles et parlementaires du 9 octobre, accordant une large victoire au Frelimo, parti au pouvoir depuis 49 ans dans ce pays lusophone pauvre d'Afrique australe.
L'annonce de ces résultats a immédiatement déclenché de violentes manifestations dans plusieurs villes, l'opposition dénonçant un scrutin "volé".
Venancio Mondlane, 50 ans, adossé au petit parti Podemos, a appelé à une grève nationale à partir de ce jeudi, et jusqu'au 7 novembre.
Il n'était pas clair si son appel à "paralyser" le pays serait suivi mais des manifestations ont déjà été signalées dans plusieurs villes.
"Je ferai tout mon possible pour qu'il n'y ait pas de violence mais nous devons nous battre pour la justice", a déclaré à la presse le président de Podemos, Albino Forquilha.
- "Sabotage" -
La police a multiplié les envois de SMS mercredi soir et jeudi matin, y compris à une correspondante de l'AFP, pour demander à la population de ne pas participer à des actes de "sabotage".
Et le procureur général a publié un communiqué avertissant que si le droit de manifester est un "droit fondamental", "toute personne qui (...) cause des dégâts matériels ou personnels sera punie".
La commission électorale a déclaré la semaine dernière Daniel Chapo, 47 ans, du Frelimo, vainqueur de l'élection présidentielle avec près de 71% des suffrages.
Venancio Mondlane, un ancien animateur de radio qui a quitté il y a seulement quelques mois la Renamo, parti d'opposition historique, est arrivé en deuxième position avec 20% des voix, toujours selon les résultats officiels.
L'opposition a déposé dimanche un recours devant le Conseil constitutionnel, plus haute cours du pays, pour exiger un nouveau comptage des voix.
Mercredi, cette cour a demandé à la commision électorale de lui transmettre tous les résultats des bureaux de vote de six des onze provinces, ainsi que ceux de la capitale Maputo.
La semaine dernière, des affrontements entre manifestants et policiers ont fait au moins onze morts, dont six dans la province de Nampula (nord), et plus d'une cinquantaine de blessés, selon plusieurs ONG.
Les observateurs électoraux ont relevé de graves irrégularités avant, pendant et après le scrutin.
L'Eglise catholique a déploré des fraudes "grossières" et l'ONG anticorruption Public Integrity Center (CIP) a estimé qu'il s'agissait des élections "les plus frauduleuses depuis 1999", très contestées.
La mission de l'Union européenne a notamment relevé des "altérations injustifiées de résultats", après avoir constaté que sur un tiers des dépouillements observés, les chiffres "ne concordent pas".
D'emblée, le nombre d'inscrits sur les listes électorales posait problème: il était supérieur (de 4%) au nombre d'adultes en âge de voter dans le pays, avait souligné la mission de l'UE.
publié le 31 octobre à 11h31, AFP