A Mayotte, dévasté par un cyclone, un couvre-feu imposé dès mardi soir
A Mayotte, un couvre-feu sera instauré dès mardi soir de 22h à 4h du matin, après le passage dévastateur et meurtrier du cyclone Chido, une "tragédie" pour Emmanuel Macron qui a annoncé qu'il se rendrait dans l'archipel "dans les prochains jours".
Ce couvre-feu est mis en place pour des raisons de sécurité, afin d'éviter les pillages, trois jours après le passage de ce cyclone, dans l'archipel meurtri qui est en manque de tout et où les habitants s'alarment d'une situation sanitaire qui se dégrade.
"Face à cette tragédie qui bouleverse chacun de nous, je décréterai un deuil national", a dit sur X lundi soir après une réunion gouvernementale de crise le chef de l'Etat qui ira "dans les prochains jours" sur place "en soutien" à la population et à toutes les personnes mobilisées.
Pour l'heure, le bilan officiel s'élève à 21 morts à l'hôpital et le préfet local a mis sur pied une "mission de recherche des morts". Mais les autorités redoutent "plusieurs centaines" de morts, peut-être même "quelques milliers" dans ce territoire et département le plus pauvre de France. "Le bilan sera lourd, trop lourd", a prédit lundi le ministre démissionnaire de l'Intérieur Bruno Retailleau.
Le décompte est d'autant plus compliqué que Mayotte est une terre de forte tradition musulmane et que, selon les rites de l'islam, de nombreux défunts ont vraisemblablement été enterrés dans les 24 heures.
"L'île est totalement dévastée" a déclaré Bruno Retailleau à La Réunion lundi soir, au retour d'un déplacement à Mayotte, précisant que "70% des habitants ont été gravement touchés".
Le ministre a annoncé l'arrivée "dans les prochains jours" de 400 gendarmes supplémentaires pour prêter main forte aux 1.600 gendarmes et policiers présents sur l'archipel, tout en précisant qu'il n'y avait "pas eu vraiment de pillage".
Le cyclone, le plus intense qu'ait connu Mayotte depuis 90 ans, a ravagé samedi le territoire de l'océan Indien, où environ un tiers de la population vit dans de l'habitat précaire, totalement détruit.
Chido a probablement été favorisé par des eaux de surface proches de 30°C, ce qui fournit plus d'énergie aux tempêtes, un phénomène de réchauffement climatique déjà observé ailleurs cet automne.
- "Besoins vitaux" -
Trois jours après la catastrophe, la priorité est d'assurer les "besoins vitaux" des habitants en eau et en nourriture, a insisté lundi Bruno Retailleau.
"On commence à manquer d'eau. Il nous reste quelques bouteilles mais il n'y a quasiment plus de stocks dans les magasins", s'inquiète auprès de l'AFP Antoy Abdallah, 34 ans, habitant de Tsoundzou.
"On risque une crise sanitaire", a alerté Ben Issa Ousseni, le président du Conseil départemental sur la chaîne Mayotte la 1ère.
Sur l'archipel, premier désert médical de France, l'unique hôpital, très endommagé, "reprend progressivement son activité" et sera soutenu par un hôpital de campagne dès jeudi, a indiqué M. Retailleau.
Lundi, 25 premiers patients "en situation urgente" ont été évacués vers La Réunion.
Autre priorité des autorités, l'envoi de tentes et de bâches pour rétablir des habitats, totalement détruits ou dont la toiture a été arrachée par des rafales de vent qui ont atteint plus de 220 km/h.
Selon la Croix-Rouge française, 20 tonnes de matériel sont en cours d'acheminement.
- Solidarité nationale -
Face à l'urgence, le nouveau Premier ministre François Bayrou a appelé à la "solidarité nationale" lundi soir, depuis son conseil municipal à Pau. Un déplacement au détriment de la réunion à Paris de la cellule de crise qui a suscité de vives critiques. Mardi, la présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet a affirmé qu'elle aurait "préféré que le Premier ministre prenne l'avion pour Mayotte".
La solidarité s'organise déjà sur le terrain malgré des conditions dégradées, alors qu'une grande partie de l'archipel est toujours privée d'électricité, de réseau mobile et d'internet.
Les secours cherchent toujours des sinistrés et s'attendent à trouver de nombreuses victimes dans les décombres des bidonvilles, très peuplés, notamment dans les hauteurs de Mamoudzou, la capitale ayant appelé lundi ses habitants majeurs et en "bonne condition physique" à "renforcer les équipes sur le terrain".
Selon Florent Vallée, de la Croix-Rouge française, "des familles entières" et "beaucoup d'enfants mineurs seuls" et "délaissés" vivent dans les bangas, ces petites maisons traditionnelles désormais détruites.
"La priorité aujourd'hui, c'est l'eau et la nourriture. Il faut à tout prix qu'on puisse éviter qu'il y ait la faim après cette crise d'une intensité incroyable", a assuré mardi matin sur RFI le maire de Mamoudzou, Ambdilwahedou Soumaila.
Les appels à la solidarité et les minutes de silence se sont multipliés en France et à l'étranger lundi, les Etats-Unis indiquant être prêts à "offrir une aide humanitaire appropriée".
publié le 17 décembre à 09h50, AFP