Politique

Michel Barnier donne des gages aux maires sur la simplification, pas sur le budget

Le Premier ministre Michel Barnier au 106e Congrès des maires, à Paris, le 21 novembre 2024

© Thomas SAMSON, AFP - Le Premier ministre Michel Barnier au 106e Congrès des maires, à Paris, le 21 novembre 2024

Le Premier ministre Michel Barnier a donné jeudi des gages aux maires en colère contre les "ponctions" budgétaires prévues pour 2025, en lançant le coup d'envoi d'un grand chantier sur la simplification, mais sans desserrer l'étau budgétaire, leur première revendication.

Face à 4.000 élus rassemblés en clôture du 106e Congrès de l'Association des maires de France (AMF), le fin négociateur du Brexit a d'abord désamorcé les critiques sur la responsabilité de la déroute budgétaire de la France.

"Il n'est pas juste de montrer du doigt les communes et les collectivités territoriales comme si elles étaient responsables de notre déficit", a-t-il déclaré, avec treize ministres à ses côtés.

Les maires et l'ensemble des collectivités protestent contre les cinq milliards d'euros "d'économies" prévus pour 2025, dont ils évaluent plutôt la facture à 11 milliards, et qu'ils considèrent comme des prélèvements d'un niveau insoutenable, avec un effet récessif à la clé.

Dans l'esprit des lois de décentralisation, Michel Barnier a touché une corde sensible pour les maires, en assurant vouloir renverser leur sentiment "d'être sous tutelle normative et financière" de l'État.

Vantant les mérites des communes, un "repère pour nos concitoyens", il a jugé que leur vocation n'était pas d'être des "sous-traitants de l'État" mais "davantage des partenaires".

Le premier vice-président de l'AMF André Laignel avait appelé auparavant à "décoloniser" les collectivités "pour ouvrir enfin le temps des libertés locales".

Le chef de l'exécutif lui a répondu en promettant "des lois moins bavardes, qui s'en tiennent aux objectifs généraux et qui ne cherchent pas à régler le détail".

"Nous devons mettre un terme à l'inflation normative", a martelé Michel Barnier, en assurant que les sur-transpositions des directives européennes seraient "examinées une par une" et pour certaines "supprimées".

Il a également annoncé "quatre décisions importantes (...) dans les semaines qui viennent".

Une circulaire sera prise pour demander aux administrations de proposer en priorité des lois qui "fixent des objectifs" et "laissent aux autorités locales des marges pour interpréter les règles".

- "Une berceuse"-

Le rôle du Conseil national d'évaluation des normes (CNEN) sera par ailleurs accru pour clarifier les lois "bien en amont de leur présentation au Parlement" tandis que les effets des lois sur les collectivités seront intégrés à leur étude d'impact.

Enfin, une simplification "du stock des normes" sera menée en matière d'urbanisme et d'environnement.

Le Premier ministre a pris en exemple la nécessité de "renverser la pyramide" sur la loi sur le "zéro artificialisation nette" des sols (ZAN), dont l'objectif est de stopper la bétonisation en 2050.

"Le ZAN ne doit pas se décliner en cascade, et de manière mécanique, de la région jusqu'à la plus petite commune", a estimé Michel Barnier.

Concernant l'effort budgétaire demandé aux collectivités, il a rappelé les concessions déjà faites aux départements, notamment sur l'abandon du caractère rétroactif de la baisse du taux du Fonds de compensation de la TVA (FCTVA).

Pour le reste, "la discussion se poursuit au Sénat", a-t-il simplement déclaré en promettant que "des amendements complémentaires feront évoluer le texte initial".

Autre grande revendication des maires à quinze mois des prochaines municipales, l'amélioration des conditions d'exercice de leur mandat fera l'objet d'un texte qui sera débattu à l'Assemblée nationale en février, sur la base d'une proposition de loi du Sénat qui sera complétée par des propositions "en matière de valorisation de l'articulation avec la vie professionnelle, de formation et de reconversion".

Pour les communes rurales, il a promis de réfléchir à l'extension du scrutin de liste paritaire aux communes de moins de 1.000 habitants, tandis qu'il a réitéré son "ouverture" à retour du cumul des mandats.

"Les constats sont les bons, les intentions affichées sont les bonnes (...) mais sur les mesures très concrètes de prélèvements supplémentaires de l'État (...) on n'a pas eu de réponse et la suite dépendra de ce qu'il va sortir de la discussion au Sénat", a réagi le président de l'AMF David Lisnard.

"Le Premier ministre nous a aimablement chanté une berceuse mais n'a pas répondu aux inquiétudes de tous les maires et à la colère de beaucoup", a fustigé de son côté le socialiste André Laignel.

"Sur une heure de discours, cinq minutes sur les finances alors que le budget 2025, avec une saignée de 11 milliards, est le plus mauvais de tous les temps", a ajouté le premier édile d'Issoudun (Indre), pour qui les services publics locaux "sont plus que jamais en danger. "

publié le 21 novembre à 21h55, AFP

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