France

Assassinat de Samuel Paty: les avocats de Chnina et Sefrioui plaident l'acquittement

  • Croquis d'audience du 4 novembre 2024 montrant ((g-d)) les accusés Abdelhakim Sefrioui, Louqmane Ingar, Azim Epsirkhanov, Priscilla Mangel, Yusuf Cinar, Brahim Chnina, Nabil Boudaoud et Ismael Gamaev à la cour d'assises spéciale de Paris
    ©Benoit PEYRUCQ, AFP - Croquis d'audience du 4 novembre 2024 montrant ((g-d)) les accusés Abdelhakim Sefrioui, Louqmane Ingar, Azim Epsirkhanov, Priscilla Mangel, Yusuf Cinar, Brahim Chnina, Nabil Boudaoud et Ismael Gamaev à la cour d'assises spéciale de Paris
  • Croquis d'audience du 4 novembre 2024 montrant ((g-d)) les accusés Abdelhakim Sefrioui, Louqmane Ingar, Azim Epsirkhanov, Priscilla Mangel, Yusuf Cinar, Brahim Chnina, Nabil Boudaoud et Ismael Gamaev à la cour d'assises spéciale de Paris
    ©Bertrand GUAY, AFP - Une photo du professeur Samuel Paty à l'Université de la Sorbonne, le 19 octobre 2024 à Paris

Après des réquisitions jugées trop clémentes par les parties civiles, les avocats de Brahim Chnina et Abdelhakim Sefrioui ont plaidé l'acquittement des deux hommes ayant, selon l'accusation, lancé "une fatwa numérique" contre Samuel Paty, assassiné par un jeune islamiste radical tchétchène le 16 octobre 2020.

"Il n'y a aucun lien direct ou indirect entre Abdelhakim Sefrioui et Abdoullakh Anzorov", l'assassin de Samuel Paty abattu peu après les faits par la police, a soutenu mercredi matin Colomba Grossi, une des avocates du prédicateur islamiste.

"Il n'y a rien de terroriste chez Brahim Chnina", avait plaidé mardi soir Nabil Ouchikli, l'un des conseils du père de la collégienne dont le mensonge a déclenché la "campagne de haine" à l'encontre du professeur d'histoire-géographie.

"C'est quoi l'objet de ce procès ? C'est le symbole ? C'est marquer l'Histoire ? C'est réparer les victimes ? C'est apaiser l'opinion publique ? Faire plaisir aux médias ? Ou c'est juger Brahim Chnina ?", a demandé un autre de ses conseils, Louise Tort.

"Ca fait quatre ans qu'il s'excuse, qu'il pleure, qu'il se fait pipi dessus", a poursuivi l'avocate avant de déplorer: "Ses excuses ça n'ira jamais, on n'en veut pas".

Le Parquet national antiterroriste a requis lundi 10 ans de réclusion criminelle, avec une période de sûreté des deux tiers, contre le Marocain Brahim Chnina, 52 ans, poursuivi pour association de malfaiteurs terroriste (AMT), ainsi qu'une interdiction du territoire français (ITF).

Contre Abdelhakim Sefrioui, 65 ans, vieux briscard du militantisme islamiste, fondateur de l'association (aujourd'hui dissoute) pro-Hamas "Collectif Cheikh-Yassine", également poursuivi pour AMT, le parquet a requis 12 ans de réclusion criminelle avec également une période de sûreté des deux tiers.

L'AMT est passible de 30 ans de réclusion.

- "Trop gros pour lui" -

Dans son box, Brahim Chnina, qui fait beaucoup plus que son âge, semble comme tassé sur lui-même. "Il est écrasé par l'horreur du crime trop gros pour lui", explique Me Tort.

Les 7 et 8 octobre 2020, Brahim Chnina a publié des messages et des vidéos dénonçant Samuel Paty comme un "malade". Il n'a pas hésité à livrer le nom du professeur et l'adresse de son collège sur les réseaux sociaux.

M. Sefrioui a réagi à ses messages dès le soir du 7 octobre et s'est rendu avec Brahim Chnina au collège de Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines) le lendemain pour demander des sanctions contre Samuel Paty. Il a lui-même publié une vidéo où le professeur est qualifié de "voyou".

Pour autant, ont relevé les avocats des deux hommes, ils ne connaissaient pas et n'ont jamais rencontré Abdoullakh Anzorov.

Dès lors, s'interroge la défense, est-ce que l'infraction d'association de malfaiteurs terroriste peut s'appliquer à l'encontre de ces deux accusés ?

Pour le ministère public, l'AMT reprochée aux deux hommes est constituée car leur campagne numérique contre Samuel Paty était "concertée" et a constitué un "ciblage viral et violent du professeur" alors même que la menace terroriste était ravivée par la republication des caricatures de Mahomet par Charlie Hebdo, en septembre 2020, à l'occasion de l'ouverture du procès des attentats de janvier 2015 contre la rédaction de l'hebdomadaire satirique et le magasin Hyper Cacher.

"Il faudrait que le directeur de la publication de Charlie Hebdo soit poursuivi pour AMT car la rédaction savait que la republication (des caricatures) allait encourager le terrorisme", ose Nabil Ouchikli en faisant référence à l'attentat du 25 septembre 2020 à proximité des anciens locaux de l'hebdomadaire. "C'est une démonstration par l'absurde", se corrige-t-il tardivement.

"Brahim Chnina est un père qui a cru sa fille. Ce n'est pas un crime. Sa vidéo n'est pas un crime", assure Frank Berton, autre avocat de l'accusé, qui en appelle au "courage" de la cour d'assises spéciale de Paris pour acquitter son client.

"Soit vous cédez à l'opinion publique et à son cortège, soit vous faites ce qui est le plus dur, c'est-à-dire juger. Juger un homme pareil, qu'on veut voir terroriste", insiste Me Berton.

"Samuel Paty est mort du terrorisme et acquitter Abdelhakim Sefrioui n'y changera rien", a mis en avant de son côté Vincent Brengarth, un des avocats du prédicateur.

Les dernières plaidoiries de la défense sont attendues mercredi après-midi.

Le verdict est prévu jeudi soir ou vendredi.

publié le 18 décembre à 13h44, AFP

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