Économie

Pas de budget de la Sécu? Beaucoup de problèmes à résoudre

  • Le Premier ministre Michel Barnier à l'Assemblée nationale à Paris le 2 décembre 2024
    ©STEPHANE DE SAKUTIN, AFP - Le Premier ministre Michel Barnier à l'Assemblée nationale à Paris le 2 décembre 2024
  • Le Premier ministre Michel Barnier à l'Assemblée nationale à Paris le 2 décembre 2024
    ©STEPHANE DE SAKUTIN, AFP - Lundi à l'Assemblée nationale, le rapporteur du budget de la Sécu, Yannick Neuder (LR), a estimé qu'un rejet du budget ne laisserait "que quelques semaines de trésorerie" aux organismes publics pour "payer les retraites, rembourser les soins et financer les impôts"

En cas de censure cette semaine du gouvernement de Michel Barnier, l'absence de budget de la Sécurité sociale ne l'empêchera pas brutalement de fonctionner début janvier. Mais un certain nombre de casse-têtes juridiques et politiques vont très vite se poser.

- Autoriser la Sécu à emprunter -

L'absence de budget dédié priverait la Sécu (ou plutôt son trésorier, l'Acoss) d'une autorisation d'emprunt pour boucler ses fins de mois et parvenir à financer les prestations, malgré son déficit structurel.

Les experts estiment que cette autorisation devrait pouvoir être donnée via une loi spéciale, voire par voie réglementaire, sans besoin d'un nouveau projet de loi. Toutefois, les spécialistes du droit public ne s'accordent pas tous sur la meilleure manière de procéder avec un gouvernement démissionnaire.

Il reste un peu de temps pour résoudre le problème, la Sécu disposant - selon plusieurs sources proches des administrations concernées - de quelques mois de réserves avant de devoir emprunter à nouveau.

Lundi à l'Assemblée nationale, le rapporteur du budget de la Sécu, Yannick Neuder (LR), a estimé qu'un rejet du budget ne laisserait "que quelques semaines de trésorerie" aux organismes publics pour "payer les retraites, rembourser les soins et financer les impôts".

"En mars prochain, qui veut que les cartes vitales cessent de fonctionner?", a-t-il interrogé, quelques minutes avant que le Premier ministre ne dégaine l'article 49-3, s'exposant à une motion de censure.

- Fixer les tarifs hospitaliers -

Le budget de la Sécu fixe chaque année un objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam), qui prévoit, entre autres, l'enveloppe financière allouée aux hôpitaux publics et privés sur l'année.

Cette enveloppe (105,8 milliards d'euros dans le projet de budget de la Sécu 2025) permet ensuite au gouvernement de calculer la rémunération des hôpitaux, en fixant en particulier les tarifs des actes de soin. Si cette enveloppe n'est pas déterminée, "il n'y a plus de base juridique solide" pour le faire, expliquait récemment Dominique Libault, le président du Haut conseil pour le financement de la protection sociale (HCFiPS).

Dans un premier temps, la solution sera probablement de reconduire les tarifs de 2024, "ce qui n'est pas une très bonne nouvelle pour les établissements de santé", a-t-il estimé.

Les hôpitaux, en lourd déficit, estiment avoir besoin en 2025 d'une hausse de 6% de l'enveloppe de 2024. Dans son budget, l'exécutif prévoyait une augmentation de 3,1%.

- Maitriser le déficit -

L'absence de Loi de financement (LFSS) priverait aussi le gouvernement de dispositions censées l'aider à maitriser le lourd déficit de la Sécu.

La dernière version du projet de budget adoptée en commission mixte paritaire (CMP) prévoit notamment de rogner de 1,6 milliard d'euros les exonérations de cotisations patronales, ou encore de renforcer la taxation sur les boissons très sucrées, pour doter la Sécu de nouvelles ressources.

Le budget prévoit aussi des outils pour ralentir les dépenses de l'Assurance maladie, par exemple via des économies sur les médicaments, ou en négociant de nouvelles baisses de tarifs avec les biologistes, radiologues et taxis conventionnés qui transportent des malades.

Sans ce texte, "le déficit des comptes sociaux atteindrait 30 milliards d'euros l'an prochain", a averti le ministre du Budget Laurent Saint-Martin devant l'Assemblée nationale.

La version adoptée en CMP prévoyait un déficit d'environ 18,3 milliards d'euros en 2025, contre 16 dans la version initiale proposée en octobre par le gouvernement.

- Des retraités épargnés? -

En vertu du Code de la Sécurité sociale, les retraites de base sont chaque année revalorisées début janvier, indexées sur l'inflation constatée par l'Insee (Institut national des statistiques) pour l'année précédente.

Pour économiser 3 milliards d'euros, le projet de LFSS prévoyait de les sous-indexer en 2025, à hauteur de la moitié de l'inflation, sauf pour les pensions inférieures au Smic qui devaient recevoir un complément en juillet.

Sans ce texte, la loi prévaut et la hausse des pensions se fera d'office sur l'inflation, assurent deux fins connaisseurs de la Sécu.

- Réformes en suspens -

Sans LFSS, un certain nombre de mesures devront attendre un autre véhicule législatif pour être adoptées, ont rappelé lundi des défenseurs du texte: exonérations de cotisations sociales vieillesse pour les médecins en cumul emploi-retraite, alignement du calcul des retraites agricoles sur celles du régime général, campagne de vaccination papillomavirus-méningocoques au collège, consultations en accès direct chez le psychologue dans le cadre de Mon Soutien Psy...

publié le 2 décembre à 19h12, AFP

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