Société

Baptiste Beaulieu, médecin et écrivain de combat au service des minorités

Le médecin et écrivain Baptiste Beaulieu à Toulouse, le 27 novembre 2024

© Ed JONES, AFP - Le médecin et écrivain Baptiste Beaulieu à Toulouse, le 27 novembre 2024

A la fois médecin à la ville et écrivain à succès, Baptiste Beaulieu s'est fait connaître pour son engagement en faveur des minorités, avec l'envie de "changer le monde" en particulier après l'agression homophobe dont il a été victime récemment dans son cabinet.

Quelques semaines après la sortie de son dernier ouvrage "Tous les silences ne font pas le même bruit" (éd. L'Iconoclaste), le médecin toulousain, devenu père en 2023, "ressent une forme d'urgence à changer le monde rapidement".

"J'écris des livres qui se vendent plus que très bien, et du coup, j'ai du pouvoir et je veux utiliser ce pouvoir pour essayer de faire changer les choses. Sinon, ce n'est pas du succès, c'est juste des éclaboussures", dit-il à l'AFP.

"Être homosexuel a fait de toi un être humain meilleur", assène-t-il dans son dernier essai écrit à la deuxième personne du singulier, où le tutoiement s'adresse autant à lui-même qu'au lecteur renvoyé à ses certitudes.

- "Stéréotypes et préjugés" -

Le médecin de 39 ans y déroule son parcours personnel pour "voir, à chaque étape de la vie d'une personne appartenant à une minorité sexuelle, où peuvent venir se nicher les stéréotypes, les préjugés".

Parmi les thèmes abordés, des moments terribles, comme ce récit de violences sexuelles vécues dans l'enfance.

"Beaucoup de mes livres parlent d'agressions sexuelles, de violences sexuelles, entre temps je suis devenu père, j'avais besoin de laisser ça derrière moi", confie celui qui pratique au cabinet le matin et écrit l'après-midi.

Le récent procès Mazan, où 51 hommes comparaissaient pour des viols sur Gisèle Pélicot, droguée par son mari, l'a pourtant atteint, "comme toutes les victimes de violences sexuelles".

"J'entends tout le monde dire que le procès va tout changer, mais ça ne va rien changer du tout. Les gens vont continuer à être comme ils sont, les hommes à violer, à ne pas se remettre en question, à se dire que le violeur c'est l'autre", affirme le médecin, qui se dit "pessimiste" sur la question.

Lui qui a publié plusieurs livres pour les enfants et tenait jusqu'en juin une chronique sur France Inter a longtemps été présent et engagé, au niveau local, dans le milieu LGBT+ toulousain, mais assure qu'il n'était pas militant quand il a commencé à exercer la médecine.

"Je mets au défi n'importe quel homme d'exercer ce métier, de voir 25 patients par jour, dont un certain nombre de patientes, et de ne pas finir par se sentir ébranlé par la somme des privilèges qui sont les nôtres, parce qu'on est nés avec un pénis et des testicules dans cette société", souligne-t-il.

- Agression homophobe -

Une prise de conscience qui l'a amené à une politisation de plus en plus affirmée, comme lorsqu'il quitte son ancien éditeur Fayard suite au rachat par le milliardaire Vincent Bolloré ou qu'il envoie des piques à l'encontre de Gérald Darmanin dans ses publications sur les réseaux sociaux.

C'est d'ailleurs sur son compte Instagram, où il compte plus de 420.000 abonnés, qu'il a évoqué début novembre une agression dont il a été victime dans son cabinet.

Un de ses patients, suivi de longue date, a voulu passer avant les autres, et face au refus de Baptiste Beaulieu, l'a insulté et menacé de s'en prendre physiquement à lui, poussant le docteur à porter plainte.

"Me faire traiter de pédé devant des patients que j'accompagne au jour le jour, ce n'est pas possible", déplore le médecin traitant, installé depuis huit ans. "Si je ne portais pas plainte ce jour-là, ça irait à l'encontre de tout ce que j'essaye de faire à travers mon dernier livre", où ses expériences de praticien reviennent régulièrement.

Des anecdotes qui le poussent à se remettre en question en tant que médecin, dix ans après la fin de ses études, quand la routine pourrait le guetter.

"Notre métier, c'est d'accueillir des visages avec des histoires, et le soir, on a honte que tous ces visages se confondent, dit-il. J'ai l'impression qu'il y a un risque, et j'essaie de lutter contre ce risque-là tous les jours, qui est celui de l'anesthésie à l'autre".

publié le 1 décembre à 11h53, AFP

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