L'Ukraine met la pression pour être invitée à rejoindre l'Otan, Trump en toile de fond
A moins de deux mois du retour de Donald Trump à la Maison Blanche, l'Ukraine a mis mardi la pression sur les pays de l'Otan pour être invitée à les rejoindre, mais les ministres des Affaires étrangères de l'Alliance, qui se retrouvent à Bruxelles, ont temporisé.
La "seule véritable" garantie de sécurité pour l'Ukraine est la "pleine" adhésion à l'Otan, a rappelé mardi la diplomatie de Kiev. Cette adhésion constituerait une menace "inacceptable" pour la Russie, a rétorqué le Kremlin.
Très prudent, le Secrétaire général de l'Otan Mark Rutte s'est contenté de réitérer la position de principe de l'Alliance. Le processus devant conduire à l'adhésion de l'Ukraine est "irréversible", a-t-il ainsi rappelé devant la presse, sans toutefois évoquer un calendrier.
Le ministre ukrainien des Affaires étrangères Andriï Sybiga entend toutefois rappeler ce message lors d'un dîner de travail à Bruxelles avec ses 32 collègues de l'Otan, sans illusion sur les chances d'être entendu cette semaine.
L'Ukraine veut aborder une éventuelle négociation de paix avec la Russie en position de force et avec des garanties de sécurité suffisantes. "La seule garantie de sécurité efficace est l'adhésion à l'Otan pour l'Ukraine", a assuré sur ce point le chef de la diplomatie estonienne Margus Tsahkna.
- "Décision monumentale" -
Plusieurs pays de l'Alliance, États-Unis en tête, sont toutefois réticents à prendre cette "décision monumentale", comme l'a qualifiée un diplomate à Bruxelles.
"Un tel geste avant l'arrivée de la nouvelle administration rendrait Trump furieux et il prendrait le contre-pied immédiatement", reconnaît un diplomate européen de l'Otan.
"Je pense qu'une adhésion à l'Otan renforcerait à nouveau la tension et la possibilité de nouveaux conflits demain", a jugé de son côté le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères Xavier Bettel.
Mais, souligne un diplomate à l'Otan, cela ne doit pas empêcher de réfléchir aux garanties que l'Alliance atlantique, ou au moins certains de ses membres, pourraient donner à l'Ukraine, particulièrement au moment où la perspective de négociations de paix semble plus proche.
Donald Trump a promis de faire la paix en Ukraine "en 24 heures" mais sans dire vraiment comment il compte s'y prendre.
Les pays européens de l'Otan redoutent d'être mis à l'écart d'une éventuelle négociation et plusieurs d'entre eux cherchent les moyens de s'assurer une place à la table des discussions, ont expliqué des diplomates de l'Otan.
- "Position de force" -
Et certains de ces pays n'excluent pas l'envoi de troupes sur le sol ukrainien, pour surveiller par exemple la mise en place d'un éventuel cessez-le-feu, ont indiqué ces diplomates. Cependant, précisent-ils aussitôt, cette discussion n'a pas lieu à l'Otan, mais entre alliés européens. Le sujet n'était donc pas à l'ordre du jour mardi, et ne le sera pas mercredi, deuxième jour de cette réunion ministérielle au siège de l'Otan.
"La réunion se concentrera sur comment s'assurer que l'Ukraine, lorsqu'elle décidera d'entrer dans des négociations, le fasse à partir d'une position de force", a assuré mardi M. Rutte.
Car, a-t-il souligné, "le front se déplace d'est en ouest, et non d'ouest en est". L'armée russe a encore revendiqué mardi la conquête de deux villages dans l'est et le sud de l'Ukraine, où ses troupes, plus nombreuses que celles de Kiev, gagnent du terrain sur l'ensemble du front à une vitesse inédite depuis mars 2022.
"Le seul moyen de mettre fin à la guerre est lorsque l'Ukraine dans un sens ou dans un autre remportera des succès sur le champ de bataille", a affirmé mardi la cheffe de la diplomatie lettonne Baiba Braze, dans un entretien avec l'AFP.
Pour y parvenir, Kiev réclame avec insistance des armes, et en particulier au moins vingt nouveaux systèmes de défense anti-aérienne, pour contrer les missiles russes qui détruisent ses infrastructures énergétiques, a rappelé le ministre ukrainien mardi à Bruxelles.
"Nous ne pouvons pas permettre à la Russie de faire de l'hiver une arme de guerre", a assuré M. Rutte, aux côtés de M. Sybiga. "Il faut faire plus".
publié le 3 décembre à 18h46, AFP