Économie

Russie: face à l'inflation, le taux directeur à 21%, au plus haut depuis 2003

  • La directrice de la Banque centrale de Russie, Elvira Nabioullina, lors du sommet des Brics, le 23 octobre 2024 à Kazan
    ©Alexander NEMENOV, AFP - La directrice de la Banque centrale de Russie, Elvira Nabioullina, lors du sommet des Brics, le 23 octobre 2024 à Kazan
  • La directrice de la Banque centrale de Russie, Elvira Nabioullina, lors du sommet des Brics, le 23 octobre 2024 à Kazan
    ©Alexander NEMENOV, AFP - Le siège de la Banque centrale russe à Moscou, le 21 juillet 2023
  • La directrice de la Banque centrale de Russie, Elvira Nabioullina, lors du sommet des Brics, le 23 octobre 2024 à Kazan
    ©Alexander NEMENOV, AFP - Le président russe Vladimir Poutine au sommet des Brics, à Kazan, le 23 octobre 2024 en Russie

Un serrage de vis historique: la Banque centrale russe (BCR) a annoncé vendredi relever son taux directeur de 19 à 21%, son niveau le plus élevé depuis 2003, pour tenter de contenir l'inflation élevée qui ne baisse pas en Russie.

"Un nouveau resserrement de la politique monétaire est nécessaire pour assurer le retour de l'inflation à l'objectif (de 4%, NDLR)", a indiqué la BCR dans un communiqué.

Face à la presse, la directrice de la BCR, Elvira Nabioullina, a déploré que, malgré des mesures restrictives, il n'y a "aucun signe de ralentissement" de la hausse des prix.

"Nous aurons besoin d'une politique monétaire beaucoup plus stricte au cours de la prochaine année", a-t-elle prévenu.

Le dernier plus haut remontait à la période entre fin février et début avril 2022, quand l'institution monétaire russe avait relevé dans l'urgence son taux directeur à 20%, pour protéger l'économie du pays face à l'avalanche de sanctions occidentales prises en représailles de l'assaut de Moscou contre l'Ukraine.

"La situation est différente aujourd'hui", a toutefois relevé Mme Nabioullina, qui a répété vouloir tout faire pour parvenir à une baisse durable de l'inflation, qui plombe le pouvoir d'achat des Russes.

L'inflation, tirée par l'envolée des dépenses publiques visant à soutenir l'offensive en Ukraine, a atteint en septembre 8,63% sur un an, selon des chiffres officiels.

Pour la première fois, la BCR a reconnu vendredi que l'inflation serait au-dessus de l'objectif de 4% en 2025 ("entre 4,5 et 5%").

- "Respect du budget" -

L'explosion des dépenses publiques, liées aux commandes du complexe militaro-industriel pour équiper l'armée russe en Ukraine, alimente depuis plusieurs mois un cycle de salaires et de dépenses des ménages en hausse.

Le budget fédéral a augmenté de près de 50% depuis 2021, des milliards d'euros allant à l'armée, aux soldats, à leurs familles et aux entreprises d'armement, permettant à l'économie de résister aux sanctions, tout en tirant les prix du quotidien à la hausse.

Sans mentionner directement le conflit, Mme Nabioullina, qui s'oppose régulièrement au ministre des Finances Anton Silouanov, a déploré l'explosion des dépenses fédérales.

Le "respect du budget" est "un facteur très important" pour limiter "la surchauffe" de l'économie, a-t-elle martelé devant les journalistes.

Or les députés russes ont voté jeudi une envolée de 30% du budget de la Défense en 2025, ce qui pourrait alimenter encore davantage cette spirale inflationniste, malgré une réforme fiscale attendue au 1er janvier prochain pour soulager les finances fédérales.

- Revers au sommet des Brics -

L'assaut ordonné par le président russe Vladimir Poutine contre l'Ukraine a fait craindre pour la prospérité de la Russie, dont l'économie s'était largement appuyée depuis son arrivée au pouvoir en 2000 sur les rentrées budgétaires issues de la vente des hydrocarbures et une ouverture vers le marché européen.

Avant cela, les années 1990 avaient été marquées par une forte instabilité économique et politique, culminant en une importante crise financière en 1998.

Si l'économie nationale a bien résisté depuis février 2022, des problèmes persistent toutefois.

Les pénuries de main-d’œuvre, conséquence directe du départ sur le front ou à l'étranger de centaines de milliers d'hommes, "limitent" la croissance, d'après l'aveu même de M. Poutine.

Le chef de l'Etat russe a relevé jeudi, lors du sommet des Brics à Kazan, que "l'un des principaux problèmes" concernait les paiements entre la Russie et ses partenaires internationaux, en raison de la frilosité de nombreux établissements bancaires étrangers qui n'acceptent plus, ou avec un certain délai, des paiements en roubles, par crainte de sanctions secondaires américaines.

Coup dur pour M. Poutine, qui souhaite s'extraire de la domination du dollar dans les échanges commerciaux. Il a aussi dit renoncer, à ce stade, aux projets de création d'une monnaie unique commune aux pays membres des Brics (une "idée pas encore mûre", a-t-il reconnu) et d'une plateforme de paiement international alternative à Swift, dont ont été exclues les principales banques russes en 2022.

Dans ce contexte, certains observateurs anticipent, à moyen terme, un scénario pessimiste de stagflation en Russie — quand l'économie souffre d'une forte inflation et d'une croissance très faible.

En attendant, le Fonds monétaire international (FMI) a revu en hausse ses prévisions de croissance pour la Russie en fin d'année, à +3,6%, avant une décélération prévue en 2025.

publié le 25 octobre à 15h43, AFP

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