Économie

Des agriculteurs de la Coordination rurale tentent vainement de manifester à Paris

Des agriculteurs, manifestants de la Coordination rurale, devant le Parlement européen de Strasbourg le 19 décembre (ARCHIVES)

© SEBASTIEN BOZON, AFP - Des agriculteurs, manifestants de la Coordination rurale, devant le Parlement européen de Strasbourg le 19 décembre (ARCHIVES)

En tracteur ou en voiture, des agriculteurs de la Coordination rurale (CR) ont tenté en vain lundi de se rassembler à Paris, retenus par les forces de l'ordre, alors que la ministre de l'Agriculture a prévenu que la capitale ne devait pas être bloquée.

Quelques dizaines d'entre eux, venus notamment de la Marne et de l'Aube, étaient bien présents lundi matin à Paris et ont tenté de se rassembler au Trocadéro pour rejoindre l'Arc de triomphe, malgré l'interdiction des rassemblements prononcée par la Préfecture de police. Mais, contrôlés par les forces de l'ordre, ils n'y sont pas parvenus.

Non loin de Matignon, sept autres accompagnés d'une chèvre ont été "évincés sans incident", selon une source policière.

Les autorités "n'ont jamais voulu nous laisser entrer dans Paris. On a demandé un point de chute pour un rassemblement, mais on ne l'a jamais obtenu", a déclaré à l'AFP le secrétaire général du syndicat Christian Convers, depuis le Trocadéro, réfutant toute "intention de bloquer quoi que ce soit".

"On va arrêter là, les agriculteurs rentrent chez eux", a-t-il dit en fin de journée. "Mais on prend note de l'entrée en matière de ce gouvernement à l'égard des agriculteurs. On n'a jamais vu une telle approche du monde agricole. Les agriculteurs apprécieront".

A la veille du coup d'envoi de la campagne électorale pour les chambres d'agriculture, les "bonnets jaunes" du deuxième syndicat agricole veulent se faire entendre: contre les accords de libre-échange, la concurrence déloyale, y compris intra-européenne, et les contrôles dans les fermes.

Depuis les départements autour de Paris, plusieurs convois avaient tenté lundi d'approcher la capitale.

Dans les Yvelines, une dizaine de tracteurs et une quinzaine de voitures ont forcé un passage, avant d'être bloqués. En Seine-et-Marne, deux petits convois ont également été contenus par les forces de l'ordre, selon une source policière.

Dans l'Essonne, un barrage a été forcé par six tracteurs, interceptés par la suite. Des agriculteurs ont été autorisés, dans un climat tendu, à rejoindre avec leurs 21 tracteurs le site d'une sucrerie Tereos; ceux en véhicule personnel se sont engagés à renoncer à Paris et à partir en convois encadrés, de même source.

- "Coup d'avertissement" -

Tout en disant comprendre "l'inquiétude" des exploitants, la ministre de l'Agriculture Annie Genevard avait prévenu lundi matin qu'il n'était pas question d'autoriser une paralysie de la ville.

"Non, on ne bloque pas, en plus un jour de rentrée scolaire", a-t-elle dit sur TF1.

"Je ne suis pas certaine que les agriculteurs se rendent plus populaires auprès des Français s'ils les empêchent d'aller travailler ou de circuler librement", a-t-elle ajouté lundi soir sur BFMTV.

Environ 200 agriculteurs avec une cinquantaine de tracteurs se sont mobilisés dans la journée, estime-t-on de source policière, prévoyant plusieurs nouvelles actions mardi, notamment à Rouen ou Gap.

Rappelant que le Premier ministre François Bayrou recevrait les syndicats agricoles lundi prochain, Annie Genevard a estimé que "l'urgence qu'ils mettent en avant pour être reçus maintenant", ne se justifiait pas vraiment.

Sur le terrain, les manifestants ont déploré d'être bloqués du seul fait de "porter un bonnet jaune".

"Notre but est d’essayer d'avoir une rencontre avec le Premier ministre ou de parler avec des parlementaires, mais là ils nous empêchent carrément de manifester", a dit M. Convers, déjà brièvement interpellé par la police dimanche alors qu'il arrivait en voiture pour participer à un regroupement place du Brésil à Paris.

Le président de la CR de l'Aube, Christophe Sichnknecht, a mis en avant l'urgence de certaines situations. "Aujourd'hui c’est le coup d'avertissement, on est capable d’aller où on veut", a-t-il assuré.

Adhérent du syndicat, Frédéric Bourbonneux, qui cultive 150 ha à Nogent-sur-Seine (Aube), raconte avoir perdu cette année 50% de rendement en blé: "l'assurance climatique compense à peine 10% (des pertes), les impôts et cotisations ont augmenté alors que le prix des céréales baissait sur les marchés, on n’y arrive pas".

Les agriculteurs protestent notamment contre la signature d'un accord de libre-échange entre l'UE et des pays latino-américains du Mercosur.

A ce sujet, Emmanuel Macron a assuré lundi que la "messe n'était pas dite". "On continuera de défendre avec force la cohérence de nos engagements", a-t-il affirmé.

Cette mobilisation survient avant les élections professionnelles, organisées du 15 au 31 janvier, qui détermineront les nouveaux rapports de force entre syndicats agricoles: la CR, qui a gagné en visibilité à la faveur d'actions coups de poing depuis l'hiver dernier, espère ravir une quinzaine de chambres à l'hégémonique alliance FNSEA-Jeunes Agriculteurs.

publié le 6 janvier à 21h38, AFP

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