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Des Mongoles veulent "changer la donne" dans un monde politique ultra-masculin

  • Dorjzodov Enkhtuya, membre du Parti démocratique, principal parti d'opposition, lors d'une interview avec l'AFP à Oulan-Bator, le 24 juin 2024 en Mongolie
    ©HECTOR RETAMAL, AFP - Dorjzodov Enkhtuya, membre du Parti démocratique, principal parti d'opposition, lors d'une interview avec l'AFP à Oulan-Bator, le 24 juin 2024 en Mongolie
  • Dorjzodov Enkhtuya, membre du Parti démocratique, principal parti d'opposition, lors d'une interview avec l'AFP à Oulan-Bator, le 24 juin 2024 en Mongolie
    ©HECTOR RETAMAL, AFP - Baatarjav Munkhsoyol (c), candidate du parti de centre-droit anti-corruption HUN et ex-employée d'une ONG, lors d'une interview avec l'AFP à Oulan-Bator, le 24 juin 2024 en Mongolie
  • Dorjzodov Enkhtuya, membre du Parti démocratique, principal parti d'opposition, lors d'une interview avec l'AFP à Oulan-Bator, le 24 juin 2024 en Mongolie
    ©HECTOR RETAMAL, AFP - Deux femmes sur la place Sukhbaatar, près du palais du gouvernement, le 24 juin 2024 à Oulan-Bator, en Mongolie
  • Dorjzodov Enkhtuya, membre du Parti démocratique, principal parti d'opposition, lors d'une interview avec l'AFP à Oulan-Bator, le 24 juin 2024 en Mongolie
    ©HECTOR RETAMAL, AFP - Des femmes assistent à un meeting d'un candidat du Parti du peuple mongol à Oulan-Bator, le 23 juin 2024 en Mongolie

En Mongolie, dans une classe politique archi-dominée par les hommes, des candidates aux législatives montent au créneau pour imposer davantage de présence féminine et encourager la future génération de jeunes femmes à suivre leurs pas.

Les électeurs mongols sont appelés aux urnes vendredi pour renouveler leur parlement. Le Parti du peuple mongol (PPM), au pouvoir depuis 2016, devrait sauf surprise conserver sa majorité.

Nouveauté cette année: les partis sont tenus par la loi de veiller à ce que 30% de leurs candidats soient des femmes.

Le nombre de candidates à se présenter atteint du coup un niveau record, grâce aussi à un nouveau système de vote qui mêle listes proportionnelles et candidats de districts élus au suffrage universel direct.

"L'époque actuelle exige des quotas", déclare à l'AFP Dorjzodov Enkhtuya, une ex-présentatrice de télévision de 51 ans qui représente le principal mouvement d'opposition, le Parti démocratique, dans le centre de la capitale Oulan-Bator.

"Il n'y a pratiquement pas de femmes à des postes de décision", déplore-t-elle. "On est en train de changer la donne."

Malgré sa croissance économique, la Mongolie accuse un retard considérable en matière d'égalité des sexes par rapport à nombre d'autres pays gouvernés par un système démocratique.

C'est notamment le cas dans les campagnes, où la vie nomade est souvent régie par de strictes normes patriarcales. Et les mentalités n'évoluent que très progressivement: ce n'est qu'en 2022 que le gouvernement a nommé la première femme gouverneure du pays.

- "Surmonter les préjugés" -

La décision avait suscité un intense débat en Mongolie, car les gouverneurs de province sont en principe tenus de participer à des cérémonies traditionnelles habituellement réservées aux hommes.

"Il y a eu des discussions publiques sur la question de savoir si une femme pouvait être gouverneure", raconte à l'AFP Khurelbaatar Baasanjargal, une avocate de 42 ans, candidate du parti au pouvoir.

"Mais notre première femme gouverneure a fait tout ce que les gouverneurs hommes peuvent faire", souligne-t-elle.

Selon plusieurs candidates, les femmes sont touchées de manière disproportionnée par l'essentiel des problèmes de la vie urbaine en Mongolie. Pollution atmosphérique qui rend les enfants malades, urbanisme désastreux qui réduit l'espace disponible pour que les jeunes puissent jouer ou encore inflation élevée: ces problèmes du quotidien affectent directement les mères de famille.

Dans une banlieue calme d'Oulan-Bator, la candidate Baatarjav Munkhsoyol, 41 ans, explique à l'AFP que les femmes politiques sont souvent obligées de "surmonter les préjugés" pour être prises au sérieux.

"Les élections, c'est un jeu d'argent et elles représentent une dépense énorme. Les campagnes de diffamation sont monnaie courante", déclare cette ex-employée d'une ONG, candidate du parti minoritaire de centre-droit et anti-corruption HUN.

"Il faut beaucoup de volonté et de courage pour se présenter à une élection lorsqu'on est une femme", notamment en raison de la corruption endémique qui en refroidit beaucoup, souligne-t-elle.

- Violence -

Des progrès sont toutefois enregistrés: les deux tiers des fonctionnaires sont désormais des femmes, selon le gouvernement mongol.

Mais pour Dorjzodov Enkhtuya, les quotas doivent aller plus loin. L'ex-présentatrice de TV appelle à ce que 50% des candidats soient des femmes.

Mais les mentalités restent difficiles à faire évoluer dans les zones rurales. Selon le Programme des Nations unies pour le développement, les deux tiers des Mongoles ont subi une forme de maltraitance physique, sexuelle, émotionnelle ou économique.

"La violence fondée sur le genre est l'un des principaux obstacles auxquels sont confrontées les femmes d'aujourd'hui", affirme Dorjzodov Enkhtuya.

L'avocate Khurelbaatar Baasanjargal explique à l'AFP avoir rencontré dans une province isolée une femme âgée qui subit depuis de longues années les violences de son mari. "Elle m'a dit être très heureuse que nous parlions désormais des droits humains des femmes", souligne-t-elle.

Lors d'un déplacement à la campagne, la candidate raconte avoir encouragé deux filles de 10 ans à réaliser leurs rêves.

"Je leur ai dit que les femmes pouvaient faire tous les métiers", affirme-t-elle.

"Elles ont souri et se sont regardées. C'est pour ça que j'ai décidé de continuer à faire de la politique: pour être un exemple pour les autres femmes."

publié le 27 juin à 12h42, AFP

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