Climat: fin de négociations chaotique pour fixer les obligations financières des pays riches
La présidence azerbaïdjanaise de la conférence sur le changement climatique de l'ONU à Bakou a proposé vendredi que les pays développés s'engagent à 250 milliards de dollars de financements annuels pour les nations plus pauvres, un chiffre publié à seulement quelques heures de la fin officielle de la COP29.
Cela représenterait deux fois et demi l'engagement actuel de 100 milliards de dollars, qui couvrait la période 2020-2025.
Après de multiples consultations dans la nuit de jeudi et vendredi, dans lesquelles le Brésil, l'Union européenne et la Chine sont omniprésents, les Azerbaïdjanais ont dévoilé, avec retard, un texte qu'ils voulaient presque final.
Ce chiffre est inférieur de moitié à ce qu'une alliance de pays en développement réclament.
Le projet d'accord fixe séparément séparément un objectif ambitieux de lever un total de 1.300 milliards de dollars par an d'ici 2035 pour les pays en développement; ce total inclurait la part des pays développés et d'autres sources de financements (fonds privés ou nouvelles taxes, par exemple).
Beaucoup s'attendent à une prolongation de la COP29 dans la nuit, voire samedi, comme la plupart des COP.
"Il y a les moyens d'arriver à un accord et que j'espère qu'on va pouvoir y arriver", dit un diplomate français. "On continuera à tout faire dans les 48H00 qui viennent parce que c'est très, très important pour tout le monde".
Des négociateurs et des ONG critiquent la gestion de la conférence par les Azerbaïdjanais, inexpérimentés pour mener des négociations aussi conséquentes entre près de 200 pays.
"C'est la pire COP de mémoire récente", va jusqu'à dire Mohamed Adow, au nom du grand réseau d'ONG Climate Action Network.
"La présidence est incompétente, c'est le chaos total", confie à l'AFP un négociateur occidental, entre deux réunions bilatérales.
La conférence s'est déroulée dans une atmosphère lourde. Le président Ilham Aliev a attaqué à la tribune la France, alliée de son ennemi l'Arménie, et les deux pays ont convoqué leurs ambassadeurs respectifs. Pendant que plusieurs militants environnementaux azerbaïdjanais sont en détention.
La question centrale, au "stade olympique" de la capitale, est de déterminer combien d'argent les pays développés, au nom de leur responsabilité historique dans le dérèglement climatique, accepteront de transférer aux pays en développement, pour les aider à affronter un climat plus destructeur et à investir dans les énergies bas carbone.
"Nous ne demandons qu'1% du PIB mondial. Est-ce trop demander pour sauver des vies?" demande Juan Carlos Monterrey Gomez, négociateur du Panama.
"Nous ne pouvons pas reporter de plusieurs années, c'est le moment", insiste le négociateur bolivien, Diego Pacheco, auprès de l'AFP.
- "Au moins" 500 milliards -
Depuis le début du sommet, le 11 novembre, des tempêtes ont tué des Philippines au Honduras, l'Espagne panse ses plaies après des inondations meurtrières, l'Equateur a déclaré l'urgence nationale à cause de la sécheresse et des incendies....
L'arrière-plan inédit de cette 29e COP est une année 2024 qui sera vraisemblablement la plus chaude jamais mesurée. Et, neuf ans après l'accord de Paris, l'humanité va encore brûler plus de pétrole, de gaz et de charbon que l'année passée.
Américains et Européens n'ont pas encore révélé, du moins publiquement, combien ils étaient prêts à payer.
- La Chine refuse toute obligation -
"Ils tournent en rond dans leurs jeux géopolitiques", a déploré la ministre colombienne Susan Muhamad.
Les pays développés négocient en fait en parallèle davantage d'"ambition" pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, mais s'opposent aux pays producteurs de pétrole comme l'Arabie saoudite. Le groupe arabe a explicitement prévenu qu'il n'accepterait aucun texte ciblant "les combustibles fossiles".
Ce qui fait désordre un an après la COP28 de Dubaï, qui a appelé à lancer la transition vers la sortie des combustibles fossiles.
En public, les pays donnent de la voix. Mais en coulisses, Chinois, Occidentaux, Etats insulaires... Tous se parlent encore.
La Chine défend ardemment l'accord de Paris de 2015 mais a tracé une ligne rouge: elle ne veut aucune obligation financière. Pas question de renégocier la règle onusienne de 1992 qui stipule que la responsabilité de la finance climatique incombe aux pays développés.
Le projet d'accord de vendredi n'oblige pas mais "invite" les pays en développement, dont la Chine fait officiellement partie, "à fournir des contributions additionnelles".
publié le 22 novembre à 12h14, AFP