Le tueur présumé d'un patron de l'assurance santé à New York plaide non coupable de meurtre "terroriste"
Luigi Mangione, soupçonné d'avoir assassiné un patron américain de l'assurance santé pour se venger contre ce secteur, a plaidé non coupable lundi à New York de l'accusation de meurtre en tant qu'acte "terroriste".
"Non coupable", a prononcé le jeune homme de 26 ans, entré dans la salle d'audience de la cour criminelle de New York mains et chevilles menottées et entravé par une chaîne métallique autour de la taille.
Un mur de policiers se dressait derrière lui, pendant cette courte audience de 20 minutes.
Luigi Mangione, diplômé d'ingénierie, ancien étudiant brillant et issu d'une famille aisée de Baltimore, est accusé d'avoir tué par balles, le 4 décembre à Manhattan, Brian Thompson, directeur général du premier assureur santé privé du pays, UnitedHealthcare.
Arrêté cinq jours plus tard, dans un McDonald's d'une petite ville rurale à 500 km de New York, le jeune homme portait sur lui des écrits laissant supposer qu'il voulait se venger contre le secteur de l'assurance santé privée.
Le meurtre de sang froid du patron de 50 ans, marié et père de deux enfants, dont les images captées par des caméras de vidéosurveillance ont fait le tour du monde, a choqué. Mais de nombreuses réactions ont aussi montré la colère profonde que des Américains éprouvent à l'encontre des programmes d'assurance santé, accusés de privilégier leurs profits au détriment des soins et de refuser des remboursements ou de faire traîner les procédures en longueur.
- "Sorte de spectacle" -
L'expression "Free Luigi" ("Libérez Luigi") est devenue courante sur les réseaux sociaux, où il a reçu de nombreuses marques de sympathie, et la police de New York s'est inquiétée dans une note interne qu'il ne devienne "un exemple à suivre".
"La rhétorique sur les médias sociaux à la suite de ce meurtre est extrêmement alarmante. Elle témoigne de ce qui bouillonne vraiment dans ce pays", a estimé dimanche le ministre de la Sécurité intérieure, Alejandro Mayorkas.
Entre une dizaine et une vingtaine de personnes manifestaient lundi matin au pied de la cour criminelle, aux cris de "La santé, maintenant".
"Le fait que Luigi soit inculpé comme un terroriste est une insulte à l'intelligence du peuple américain", a déclaré Kara Hay, une professeure, reprenant mot pour mot une expression lancée par Luigi Mangione au lendemain de son arrestation.
"Je ne me sens pas terrorisée par ses actions (...) mais chaque jour les gens sont terrorisés par notre système de santé corrompu", a-t-elle accusé.
L'arrivée de Luigi Mangione à New York jeudi, en provenance de l'Etat de Pennsylvanie où il avait été arrêté, avait été soigneusement mise en scène par les autorités, les images montrant le jeune homme, vêtu d'une combinaison orange, escorté lentement par des membres des forces de l'ordre casqués et mitraillette en bandoulière. Le maire de la ville, Eric Adams, qui a autorité sur la police de New York, accompagnait le cortège après l'atterrissage de l'hélicoptère transportant l'inculpé.
"Une sorte de spectacle", a dénoncé lundi son avocate, Karen Agnifilo. Luigi Mangione est devenu "de la chair à canon politique", a-t-elle ajouté. "Il n'est pas un symbole", "il faut que ça cesse", a-t-elle encore martelé.
Luigi Mangione avait déjà comparu jeudi pour le meurtre de Brian Thompson mais dans le cadre d'une procédure distincte ouverte par la justice fédérale, devant laquelle il encourt la peine de mort s'il est reconnu coupable.
Devant la justice de l'Etat de New York, il est inculpé par un grand jury de citoyens pour 11 chefs d'accusation, dont celui de meurtre en tant qu'acte "terroriste". Ce procès, où l'accusé encourt la prison à vie, est prévu avant celui devant la justice fédérale.
Plusieurs éléments l'impliquent dans le meurtre selon la police: ses empreintes digitales ont été retrouvées près de la scène du crime, tout comme des douilles correspondant à l'arme en kit, dont certains éléments fabriqués à l'aide d'une imprimante 3D, retrouvée sur lui.
publié le 23 décembre à 18h45, AFP