Ciné Minute, la chronique cinéma de Public Sénat : Promised land

par publicsenat

Quinze ans après « Will Hunting », Gus Van Sant retrouve Matt Damon pour une fable sociologique sur fond de militantisme écolo. Producteur, co-scénariste et acteur principal, Matt Damon est passé tout proche de la réalisation de Promised Land. C’est l’emploi du temps surchargé de la vedette hollywoodienne qui a permis les retrouvailles avec son vieux complice Gus Van Sant. Et qui mieux que le réalisateur qui lui a offert son premier Oscar (oscar du meilleur scénario original pour Will Hunting) pour mettre à bien ce projet si cher à l’acteur. « On voulait d’abord faire un film sur l’Amérique, ses valeurs contradictoires, et sur ces instants cruciaux où le pays s’apprête à faire un choix historique », expliquait récemment Matt Damon. C’est sous les traits de Steve Butler, fils de fermier et commercial model d’une multinationale gazière que la star porte son film à l’écran. Son personnage écume la campagne américaine avec sa collègue au professionnalisme sans faille Sue Thomason (Frances McDormon, géniale) pour convaincre les petits exploitants, touchés par la crise, d’autoriser sur leur terre des forages de gaz de schiste. Un jeu d’enfant pour la meilleure team de la boite, capable de faire croire en dix minutes à n’importe quel cul terreux que cette ressource énergétique est la seule planche de salut qui les sépare d’une misère inéluctable. La machine à signer des contrats sous payés s’enraye lorsqu'un professeur de chimie à la retraite et un militant écolo alertent la population sur les dangers pour l’environnement de la méthode d’extraction du gaz… Avec « Gerry « ou encore « Paranoid Park », Gus Van Sant nous avait habitués à des œuvres expérimentales et personnelles. Pour Promised Land, la photographie, le récit, la simplicité du scénario et jusqu’à la bande originale très pop sucre, le réalisateur épure son style afin de donner plus d’efficacité à ce thriller socio-politique , plus à l’image de son « Harvey Milk », que de son« Elephant ». Avec en vedette, l’acteur le plus « bankable » d’Hollywood, tout ça fleurait bon les Oscars, au moins un, quand même… Même pas, l’accueil fut plus que mitigé outre Atlantique Dès le générique de Promised Land, on est interpelé par le logo « Image Nation Abu Dhabi » à la coproduction. Il n’en fallait pas plus, pour voir une levée de boucliers chez les défenseurs du gaz de schiste qui distinguent dans ce film, une œuvre antipatriotique à la solde des Emirats, destinée à empêcher la future indépendance énergétique de la plus grande puissance mondiale. Moins qu’un réquisitoire anti gaz de schiste, c’est plus une certaine idée de l’identité américaine que Promised land met en valeur. La démocratie à l’échelle locale, chaque citoyen, même au fin fond de la Pennsylvanie, a son mot à dire sur les choix stratégiques de son pays. Le concept du « fuck you money » utilisé par le personnage de Matt Damon pour convaincre les fermiers les plus réticents : l’argent ne corrompt pas, il est symbole de liberté et de bien être. Des idées assez révélatrices du dilemme auquel l’Amérique est confrontée. L’environnement et la santé publique doivent-ils être sacrifiés sur l’hôtel de la prospérité économique ? Une dualité incarnée par le personnage de Matt Damon, héros paradoxal, à la fois négociateur hors pair de contrats iniques et d’une naïveté infantile face aux ravages environnementaux de la technique de fracturation hydraulique. Une fois évacuée l’histoire d’amour artificielle, la touche réaliste de ce film bicéphale est à chercher chez ses héros et ses vilains volontairement mal définis, comme un rappel poétique de la dualité humaine. Promised land de Gus Van Sant sortie le 17 avril

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