Pour la première fois un ministre en fonction, Eric Dupont-Moretti est jugé par la Cour de justice de la République pour "prise illégale d'intérêts"

par morandini

Pour la première fois un ministre de la justice en fonction sera assis sur le banc des prévenus d'un tribunal. Et pendant les 10 jours d'audience annoncés, du 6 au 16 novembre 2023, Eric Dupont-Moretti restera en fonction. Aucun intérim n'est programmé pour le moment. Il sera pourtant absent du conseil des Ministres, excusé à l'avance par le président de la République et sa Première ministre.Dès aujourd'hui et pour 10 jours, Eric Dupont-Moretti, prendra place sur le banc des prévenus de la Cour de justice de la République, accusé de prise illégale d'intérêts. La Cour devra trancher sur une question : a t-il usé de ses fonctions de ministre pour régler ses comptes d'avocat avec des magistrats?Il est le premier garde des Sceaux en exercice à se retrouver en procès. Il encourt jusqu'à cinq ans d'emprisonnement et 500.000 euros d'amende pour prise illégale d'intérêts, ainsi qu'une peine d'inéligibilité et d'interdiction d'exercer une fonction publique.Pourquoi le Ministre se retrouve-t-il donc devant la Cour de Justice ? Le 25 juin 2020, l'hebdomadaire Le Point révèle que le parquet national financier (PNF) a ouvert une enquête en 2014 afin de trouver une "taupe" qui aurait informé Nicolas Sarkozy qu'il était sur écoute dans l'affaire "Paul Bismuth".Les fadettes (factures téléphoniques détaillées) de plusieurs avocats - dont Eric Dupond-Moretti - ont été épluchées, mais l'enquête classée sans suite fin 2019.Dénonçant des "méthodes de barbouzes", le ténor du barreau dépose plainte contre le PNF, le 1er juillet.Le 6 juillet 2020, il est nommé ministre de la Justice et retire sa plainte. Mais quelques jours après, il ordonne une enquête administrative sur trois magistrats du PNF : Patrice Amar et Ulrika Delaunay-Weiss, chargés du dossier des "fadettes", et leur ancienne supérieure hiérarchique Eliane Houlette.Éliane Houlette et Patrice Amar seront blanchis, le 19 octobre 2022, par le Conseil supérieur de la magistrature (CSM).En octobre 2020, Mediapart révèle par ailleurs que le garde des Sceaux a également lancé une enquête administrative, le 31 juillet 2020, cette fois contre le magistrat Edouard Levrault. Il avait mis en examen un des clients de l'avocat pénaliste et ce dernier avait à l'époque critiqué ses méthodes de "cow-boy". Le juge est blanchi, le 15 septembre 2022, par le CSM.Dénonçant deux situations de conflit d'intérêts, trois syndicats de magistrats et l'association anticorruption Anticor déposent des plaintes contre le ministre en décembre 2020.

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