Avec les occupants du Théâtre de Montreuil: "Parce que le monde d’avant, ce n’est pas le nôtre"
par humanite-fr
Tous les jours, à 17h, ils crient. Pour leur droits, pour un futur emploi, la réouverture des lieux de culture… et pour extérioriser, ensemble. Ils crient entre occupants du Nouveau théâtre de Montreuil (NTDM) d’abord, mais aussi entre différents théâtres occupés. Ce moment fédérateur et cathartique symbolise à lui-seul le mouvement de théâtres occupés partout en France -lancé par l’Odéon le 4 mars- qui par son essence-même crie l’indignation. Cette indignation est collective, tout comme les moyens imaginés pour la transposer en leviers d’action concrète. Pour Annick, étudiante en théâtre et occupante du NTDM depuis 16 mars, il s’agit d’une initiative salutaire : “On était en train de perdre un peu la tête, à crier tous seuls dans nos salles de répétition. Se retrouver ensemble comme ça, c'est quelque chose d'assez fort, après ces mois passés totalement isolés”. À propos du fameux cri, elle ajoute: “C'est quelque chose de beau, de savoir qu’à 17 heures, on crie ici, et qu’ailleurs, dans les autres théâtres, ils sont en train de faire la même chose”. Parmi les occupants l’on trouve des étudiants en théâtre, ou encore des artistes émergents, de jeunes Montreuilloises et Montreuillois, ainsi que des visiteurs d’autres théâtres occupés, venus prêter main forte par solidarité. “On a eu la visite de quelqu’un de la Colline, des gens de l’Odéon” détaille Léonore, elle aussi étudiante en théâtre. Par ailleurs, le NTDM dispose de référents en discussion “soit tous les jours, soit tous les deux jours avec les occupants de la Colline, de l'Odéon, du théâtre Gérard Philipe à Saint-Denis” poursuit-elle. Comme dans les autres théâtres occupés, l’investissement des lieux est une façon pour les artistes de maintenir un lien avec le public, avec des représentations jouées en extérieur, tout en échangeant et débattant sur les dysfonctionnements d’un système producteur de précarité et soumis aux restrictions budgétaires. “On a pris conscience que la situation était déjà très compliquée avant l’épidémie, et on a envie d’occuper cet espace pour pouvoir se questionner ensemble, trouver des solutions, se battre pour nos droits, pour avoir accès un emploi” défend Capucine, une troisième étudiante en théâtre. Au-delà de la réouverture des lieux de culture, c’est en effet tout le secteur culturel qui dérange. Parmi les revendications figurent la prolongation de l’année blanche pour les intermittents du spectacle, l’insertion professionnelle des artistes émergents au sein des scènes nationales, de meilleures conditions de travail, ainsi qu’une baisse du quota d’heures nécessaires pour accéder au statut d’intermittent. “On ne veut pas de retour en arrière, parce que le monde d’avant, ce n’est pas le nôtre” appuie Capucine. “Si, ici, on veut trouver d’autres manières d’avancer ensemble, c’est pour ne pas subir un monde qu’on a pas choisi”.
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