Un tableau caché de Cézanne découvert à la bastide du Jas de Bouffan
par La Provence
À l’occasion des travaux de restauration de l'édifice, une partie de décor de 6 m² peinte par le maître aixois a été mise au jour dans un grand salon du rez-de-chaussée. Récit d’une découverte hors norme, que le grand public pourra voir à la réouverture du monument, en 2025. Ce salon, et ses grands murs blancs, ont constitué son premier terrain de jeu. C’est là, à Aix-en-Provence, au rez-de-chaussée de la bastide du Jas de Bouffan, achetée par son père en 1859, que le jeune Paul Cezanne a posé ses premières créations, expérimenté ses qualités de peintre. Avant les mythiques Sainte-Victoire, avant même d’installer son chevalet dans le parc de la propriété, le maître aixois a commencé par peindre des compositions murales. Une douzaine d’œuvres, dont les quatre saisons, ont décoré la pièce pendant quatre décennies. Puis, à la vente de la propriété, elles ont au fur et à mesure été déposées pour aller prendre place dans les plus grands musées ou chez des collectionneurs avisés. Mais la bastide n’avait pas livré tous ses secrets. Alors qu’une campagne de restauration a été lancée, en vue d’une réouverture du lieu au public, une étude poussée a permis de mettre au jour, cet été, un trésor insoupçonné : un gros morceau de décor, dans la partie supérieure d’un pan de mur au sud-est du salon, représentant vraisemblablement une entrée de port. Et ce grand panneau était caché sous du papier peint, depuis fort longtemps. "De toute l’histoire du lieu, on n’a aucun témoignage de la présence de cette peinture-là, souligne Bruno Ely, directeur du musée Granet. Les autres peintures, on les connaissait, on savait qu’elles avaient été détachées des murs à différentes périodes. Mais à aucun moment, on ne pensait qu’il en restait une in situ, sur une surface non négligeable, même si on a beaucoup de ciel…"Une peinture dont l’auteur est bien Paul Cezanne, comme a pu le certifier la société Cezanne. Des éléments scientifiques viennent aussi conforter cette idée, après étude des strates successives. Ce travail "indique de façon claire, et sans contestation possible, que ce décor vient directement sur les plus anciennes couches mises en œuvre", explique David Kirchthaler, chargé des monuments historiques à la direction du patrimoine de la Ville d’Aix. Une stratégie de la patience payante Autrement dit, entre la période XVIIIe, quand la bastide est propriété de la famille Truphème, et la période Cezanne, de 1859 à 1899, "il n’y a rien. On est forcément au premier propriétaire après Truphème". Un propriétaire qui s’appelle… Louis-Auguste Cezanne, le père de Paul. La stratégie de la patience, pour la rénovation de la bastide, a donc été payante. "On aurait pu restaurer plus vite, pour rouvrir plus vite. Mais au contraire, l’idée a été de prendre le temps. Et c’est en prenant le temps que les dégagements ont permis d’aller beaucoup plus loin, et finalement de découvrir cette peinture. Sinon, on repartait peut-être pour 50 ans, et on serait passé pour des crétins !"
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