La Cour suprême américaine va examiner la loi menaçant TikTok d'interdiction
Le réseau social TikTok a remporté mercredi un premier succès dans sa bataille judiciaire aux Etats-Unis contre une loi obligeant sa maison mère chinoise à le vendre sous peine d'interdiction, la Cour suprême acceptant d'examiner la constitutionnalité de cette loi.
Le Congrès américain a adopté ce texte en avril à une large majorité - rassemblant des élus démocrates comme républicains. La loi vise à prévenir les risques d'espionnage et de manipulation par les autorités chinoises des utilisateurs de TikTok, qui en revendique 170 millions aux Etats-Unis.
La loi, aussitôt promulguée par le président Joe Biden, fixe à la maison mère du réseau social, ByteDance, la date limite du 19 janvier pour s'y conformer.
TikTok a contesté à plusieurs reprises avoir transmis des informations au gouvernement de Pékin et assuré qu'il refuserait toute requête éventuelle en ce sens.
Il a été débouté le 6 décembre de son recours contre cette loi par la Cour fédérale d'appel de Washington, qui a également rejeté le 13 décembre sa demande de suspension.
La Cour suprême américaine a en revanche accepté mercredi de se pencher sur ce dossier. Elle n'a pas suspendu l'entrée en vigueur de la loi, comme le lui ont demandé lundi TikTok et Bytedance mais a fixé les débats au 10 janvier. Ils porteront sur la question de savoir si cette loi viole le Premier amendement de la Constitution américaine garantissant la liberté d'expression.
"Le Congrès a adopté une restriction massive et sans précédent de la liberté de parole", affirment TikTok et ByteDance, soulignant que la loi doit entrer en vigueur à la veille de l'investiture du nouveau président, Donald Trump.
- "Dangereux précédent" -
Le réseau social table visiblement sur la sympathie du président élu, qui a confié lundi avoir un "faible" pour TikTok. Il a ensuite reçu le même jour le patron de TikTok Shou Zi Chew, dans sa résidence de Mar-a-lago, selon les médias.
Donald Trump avait pourtant lui même tenté d'interdire TikTok à l'été 2020, lors de son premier mandat, à coup de décrets exécutifs qui avaient été rejetés par la justice.
Il s'est depuis ravisé, appelant les électeurs attachés au service à voter pour lui. Le républicain voit dans TikTok une alternative à Facebook et Instagram, les deux plateformes de Meta, qui l'avaient temporairement exclu après son soutien aux participants à l'assaut du Capitole le 6 janvier 2021.
Mais la loi fait également l'objet de vives critiques de défenseurs de la liberté de d'expression.
Ses promoteurs n'ont pas étayé leurs accusations selon lesquelles "le contenu de TikTok aurait été manipulé par le gouvernement chinois", a ainsi déclaré mardi lors d'une conférence de presse en ligne Yanni Chen, une juriste de l'ONG Free Press.
"ByteDance n'appartient pas au Parti communiste chinois. TikTok est une entreprise américaine. Les données de TikTok Etats-Unis sont stockées sur des serveurs aux Etats-Unis contrôlés par une entreprise américaine", a-t-elle relevé.
"Cette loi est vraiment problématique", a également estimé George Wang, juriste au Knight First Amendment Institute, un centre de l'université de Columbia spécialisé dans la défense de la liberté d'expression, dénonçant un "dangereux précédent".
"Restreindre l'accès aux médias étrangers est une tactique que nous associons habituellement aux régimes répressifs, y compris paradoxalement le gouvernement chinois", a-t-il souligné, reprochant aux autorités américaines de ne pas avoir démontré la nécessité d'une législation aussi sévère.
Le réseau social a de nouveau dénoncé à l'appui de son recours devant la Cour suprême "une censure massive". "Les estimations montrent qu'elle ferait perdre aux petites entreprises sur TikTok plus d'un milliard de dollars de chiffre d'affaires et coûterait aux créateurs de contenu presque 300 millions de dollars de manque à gagner", selon lui.
publié le 18 décembre à 19h58, AFP