Faits divers

Ajaccio : meurtre d’un pompier, le drame qui interroge sur les violences et les dérives en Corse

© capture d'écran google maps

L’assassinat de Pierre-Louis Giorgi, 33 ans, le 23 décembre dans un bar d’Ajaccio, met en lumière les violences insulaires et questionne une fascination culturelle pour les armes. Cet événement tragique relance le débat sur les dérives de la société corse, comme le rapporte Le Monde.

Lundi 23 décembre, le bar Le Lamparo, lieu prisé de la jeunesse ajaccienne, est devenu le théâtre d’un drame, relaye Le Monde. Vers 23h20, un homme a ouvert le feu sur les clients, faisant sept victimes, dont Pierre-Louis Giorgi, pompier de 33 ans, qui a succombé à ses blessures. Six autres personnes ont été blessées. Le lendemain, ce lieu de convivialité s'est transformé en autel improvisé, où des bougies témoignent du choc collectif.

Cinq jours plus tard, lors des obsèques de Pierre-Louis Giorgi dans la cathédrale d’Ajaccio, une foule dense et silencieuse a rendu hommage au défunt. Une haie d’honneur de pompiers, des confréries religieuses et des commerces fermés en signe de solidarité traduisaientle profond traumatisme local. Mais cet hommage solennel a laissé place à des interrogations brûlantes sur la violence endémique en Corse.

Avec un taux de possession d’armes trois fois supérieur à la moyenne nationale, la Corse est confrontée à une réalité alarmante : 56 647 armes recensées pour 16 443 détenteurs en Corse-du-Sud en 2022. Ces chiffres traduisent une " banalisation des logiques guerrières ", selon le procureur Nicolas Septe.

Une île où les armes prolifèrent, la montée des trafics et des addictions

Cette culture des armes s’enracine dans une fascination pour le " mythe du voyou corse ", dénoncée dès 2013 par des figures judiciaires, et relayée dans l’art et la littérature. Elle s’accompagne de statistiques inquiétantes : entre 2016 et 2022, la Corse affiche les taux les plus élevés de victimes d’homicides en France, avec 3,2 pour 100 000 habitants en Corse-du-Sud et 3,7 en Haute-Corse.

À ces violences s’ajoute un contexte de délinquance lié aux stupéfiants. En 2023, 923 infractions à la législation sur les drogues ont été enregistrées, marquant une hausse significative. Les addictions, notamment à la cocaïne, touchent de plus en plus la jeunesse insulaire.

Ces tendances alimentent un climat d’insécurité exacerbé dans les zones urbaines et les établissements nocturnes. Une source policière appelle à une stratégie de harcèlement administratif et judiciaire pour contrer les liens entre certains bars et la sphère criminelle. Face à ce drame, des voix s’élèvent pour dénoncer l’inertie collective. Liza Terrazzoni, socio-anthropologue, critique la reproduction d’une culture où se mêlent identité insulaire et violence. Le maire d’Ajaccio, Stéphane Sbraggia, exprime sa " colère " et son souhait d’une mobilisation collective contre ces dérives qui " brisent des familles et des destins ".

L’assassin présumé, Anthony Padovani, 41 ans, connu de la justice, s’est constitué prisonnier et a été mis en examen. Malgré cette avancée judiciaire, le drame du Lamparo est un signal d’alarme, la Corse doit impérativement trouver les moyens de freiner cette spirale de violence.

publié le 29 décembre à 17h00, Orane Guisset, 6médias

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