Culture

Invité à un déjeuner d'auteurs best-sellers, Jordan Bardella sème la zizanie chez les écrivains

© Courdji Sebastien/ABACA - Jordan Bardella à Henin-Beaumont lors d'une séance de dédicaces de son livre

Chaque année, l’hebdomadaire l’Express organise un déjeuner qui réunit les plus gros vendeurs de livres. Mais l’édition 2024 est un peu particulière puisque le président du Rassemblement national, Jordan Bardella, fait partie des convives, mercredi 5 février.

Un rendez-vous de toutes les discordes. Mercredi 5 février, L’Express organise son déjeuner annuel afin de rassembler les auteurs ayant vendu le plus de livres. Mais certains ont déjà annoncé qu’ils ne participeront pas, révèle Libération mardi. Et pour cause, un petit nouveau a récemment fait son entrée fracassante dans le monde de la littérature et est convié à ce rassemblement : Jordan Bardella.En publiant son premier livre, "Ce que je cherche" (Fayard), le 5 décembre 2024, le président du Rassemblement national a frappé fort. Son autobiographie s’est écoulée à plus de 140 000 exemplaires.

Une liste prestigieuse d’absents

Mais cette invitation n’est pas au goût de tout le monde. De nombreux auteurs prestigieux ont fait savoir qu’ils ne participeront pas au déjeuner. Selon les informations du quotidien, le prix Goncourt 2024 Kamel Daoud, qui a déjà vendu "Houris" à plus de 260 000 exemplaires, sera absent, tout comme le prix Renaudot 2014 David Foenkinos, dont le dernier roman "La Vie heureuse" s’est écoulé à 125 000 exemplaires. L’écrivain franco-rwandais Gaël Faye, récompensé du prix Renaudot 2024, fera aussi l’impasse.

Certains écrivains, de manière anonyme, semblent craindre la manière dont le public pourrait interpréter un déjeuner avec Jordan Bardella : "Quoi qu’on fasse, on est transformé de raconteurs d’histoires en personnalités avec un message politique. Moi, je suis d’accord pour que quiconque diffuse un message par un livre, tant que ça reste dans la légalité. Je ne suis personne pour m’opposer à ça (…) Mais il y a une différence entre ne pas être contre que Bardella écrive un livre, et faire la fête avec lui."

Le traditionnel cliché de ce déjeuner est aussi remis en cause. "Une photo dont on ne va pas maîtriser le narratif", dit une autrice, et qui "entre clairement dans une opération de banalisation de sa part."

"C’est normal qu’on l’invite"

Et alors que certains écrivains sont furieux de ne pas avoir été mis au courant de la venue du patron du parti d’extrême droite, le directeur de la rédaction de L’Express, Éric Chol, a répondu sans détour à Libération : "On n’annonce jamais, on n’a pas changé d’un iota notre méthode", a-t-il assuré.

Concernant la décision d’inviter Jordan Bardella, L’Express évoque d’autres précédents. "Cela fait vingt-six ans que nous procédons ainsi. Nous essayons toujours d’avoir une quarantaine d’auteurs que nous invitons sans discrimination. Par le passé, Simone Veil ou Éric Zemmour sont venus", a déclaré Éric Chol. Avant d’ajouter : "On a un déjeuner qu’on fait chaque année, c’est normal qu’on l’invite."

publié le 4 février à 17h20, Sébastien Salpietro, 6Medias

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