Budget 2025 : Bercy aurait ignoré des notes confidentielles alarmantes concernant l’état des finances publiques
© Yaghobzadeh Alfred/ABACA - Ministère de l'Économie
En 2024, le déficit public en France pourrait dépasser les 6 % du PIB. Selon une enquête menée par l'Œil du 20 heures, publiée jeudi 10 octobre, le ministère de l’Économie aurait pu prévoir cette tendance grâce à des notes confidentielles datant de l’année dernière.
Une situation qui aurait pu être anticipée. Alors que l’état des finances publiques en France semble être au plus mal, France Télévisions a publié une enquête troublante. Dans l’Oeil du 20 heures, diffusé dans le journal télévisé de France 2 jeudi 10 octobre, nos confrères ont dévoilé le contenu de certaines notes confidentielles du ministère de l’Économie datant du 28 novembre 2023. Dans un mémo, Bercy prévient le cabinet de Bruno Le Maire, ministre de l'Économie de l’époque, que "l'activité française a ralenti de façon plus marquée que prévu." Une semaine plus tard, une nouvelle note alerte que le déficit pour l’année 2023 atteindrait 9,2 milliards d’euros, faute de recettes.
Dans les notes confidentielles, le directeur général du Trésor avait toutefois précisé que les chiffres n’étaient pas encore définitifs : "Il convient de rester prudent, mais la tendance n’est pas bonne." Une incertitude qui pousse les dirigeants à patienter. “Quand vous êtes en responsabilité, pour pouvoir agir, il faut avoir la bonne information et quand les directions d'administration vous disent : 'Il est trop tôt pour agir, il est trop tôt pour communiquer', c'est normal qu'on attende d'y voir clair", a expliqué Thomas Cazenave, ancien ministre délégué aux Comptes publics. Mais alors que la situation dérape, Bruno Le Maire a multiplié les déclarations annonçant vouloir atteindre les "4,4 % de déficit" du PIB. Pourtant, une note confidentielle émise en février 2024 révèle que celui-ci a atteint 5,7 %, soit une différence de 35 milliards d’euros.
"Une part de l'information a été retenue"
Inquiet, Jean-François Husson, sénateur républicain et rapporteur général du budget, a décidé de prendre les choses en main. Le 21 mars dernier, il s’est rendu à Bercy pour consulter des documents. "Et là, en trois heures, on découvre qu'il y a eu des alertes. Ça me conforte dans l'idée qu'on ne nous a pas tout dit, qu'une part de l'information a été retenue", a-t-il regretté auprès de France Télévisions, précisant qu’il avait demandé à Bruno Le Maire pourquoi il n’avait pas annoncé plus franchement les éléments dont il disposait. Ce à quoi l'ancien ministre avait répondu : "Ma responsabilité vis-à-vis des Français ne consistait pas à semer la panique en indiquant que le déficit allait atteindre 5,7 % du PIB, mais à prendre les mesures nécessaires pour contenir les conséquences d'un déficit 2023 supérieur à ce qui a été prévu."
publié le 11 octobre à 08h50, Tanguy Jaillant, 6Medias