#MeToo à l’hôpital : le gouvernement présente ses premières mesures pour accompagner les victimes de violences sexuelles et sexistes
© PA Photos/ABACA - D'autres mesures devraient être annoncées avant la fin de l'été.
Le ministre délégué chargé de la Santé, Frédéric Valletoux, a annoncé au Parisien des mesures visant à accompagner les victimes et à mettre fin à l’"omerta" qui entoure les violences sexuelles et sexistes en milieu hospitalier.
Après que son cabinet a reçu une délégation de professionnels, mercredi 29 mai, Frédéric Valletoux, le ministre délégué à la Santé a dévoilé au Parisien les premières mesures visant à faire reculer les violences sexuelles et sexistes à l’hôpital. "Il doit y avoir une tolérance zéro dans le système de santé", lâche-t-il. Le plan a été mis au point après des réunions avec des associations, des syndicats et des instances diverses, à la suite des accusations de l’infectiologue Karine Lacombe contre l’urgentiste Patrick Pelloux, qui dément tout harcèlement sexuel, et d’une multitude d’autres témoignages. Il repose sur quatre volets : des enquêtes plus efficaces, une meilleure formation, un accompagnement renforcé des victimes et plus de transparence.
Pour le moment, lorsque des violences sexuelles ou sexistes sont signalées, l’enquête est généralement réalisée en interne. Si bien qu’elle n’aboutit pas toujours. "Souvent, la difficulté est de trouver un tiers de confiance à qui se confier et de sortir de l’entre-soi", souligne celui qui a présidé la Fédération hospitalière de France (FHF). Pour faire mieux, une cellule d’experts extérieurs sera créée. Elle pourrait se composer, par exemple, de professionnels de santé engagés sur ce sujet et de jeunes retraités.
Une formation obligatoire
Toujours dans la perspective de "rendre les enquêtes plus efficaces", Frédéric Valletoux a expliqué au quotidien qu’avec l’aide du ministère de la Justice, chaque parquet sera sensibilisé. Dans ce cadre, des correspondants locaux pourraient être identifiés. Le plan prévoit également que d’ici à trois ans, le personnel des établissements publics de santé ait suivi une formation obligatoire aux violences sexistes et sexuelles. Les responsables et maîtres de stage, qui encadrent les internes, sont particulièrement concernés par ce point. Les modalités précises restent à définir, mais cela pourrait prendre la forme de deux demi-journées, par exemple.
Afin de libérer la parole, une association tiendra une ligne d’écoute dédiée. En effet, selon une enquête de l’Association nationale des étudiants en médecine de France (ANEMF) publiée en mars 2021, seuls 22 % des étudiants qui avaient subi une agression sexuelle avaient effectué un signalement. Les autres avaient préféré se taire, par crainte de retombées, notamment.
"Tourner la page de l’omerta"
À l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), une cellule d’écoute pour les victimes d’abus a déjà été lancée en septembre 2021. Depuis, moins de 300 signalements ont été réalisés et à peine 5 % d’entre eux concernaient des situations à caractère sexuel et sexiste. "On veut mettre en lumière ce qu’il se passe pour tourner la page de l’omerta", affirme Frédéric Valletoux. Dans ce but, tous les établissements ou institutions devront publier annuellement le nombre de signalements, d’enquêtes et de sanctions prises en son sein.
Le ministère ne compte pas en rester là. Avant la fin de l’été, d’autres mesures seront annoncées. "Dans le monde de la santé s’appliquent aussi les lois de la République, et notamment la présomption d’innocence. Le seul signalement ne peut pas conduire à une mise en retrait automatique et la procédure disciplinaire doit suivre son cours", ajoute Frédéric Valletoux en réponse à la demande des associations réclamant la mise à l’écart, "par principe de précaution", d’un professionnel de santé visé par un signalement. Néanmoins, il garde la porte ouverte à de possibles cas particuliers, "en fonction de la gravité des faits signalés et des éléments recueillis".
publié le 31 mai à 09h31, Cathy Gerig, 6medias