France

Désert médical : dans la Nièvre, des élus utilisent l’humour noir pour dénoncer la détresse hospitalière

© AhmadArdity/Pixabay. - À Nevers et Décize, les urgences sont en manque chronique de praticiens (photo d'illustration).

"Il est formellement interdit à tout habitant de tomber malade." Dans la Nièvre, une mairesse prend un arrêté "ironique" pour dénoncer la situation "très grave" des urgences, rapporte France 3 Bourgogne-Franche-Comté. Le département est l’un des pires déserts médicaux de France.

"Il est formellement interdit à tout habitant de tomber malade, sous peine de ne recevoir aucune prise en charge médicale en raison de la fermeture répétée des services d’urgences." Si l’arrêté est "ironique", son autrice, Julie Guyot, mairesse de Decize dans la Nièvre, rit jaune. Car ce document "symbolique" publié le 8 octobre est le dernier recours que l’édile a trouvé pour dénoncer l’état de délabrement "très grave" des urgences de l’hôpital de sa commune de 5 600 habitants environ, raconte France 3 Bourgogne-Franche-Comté.

Six praticiens seulement aux urgences de Nevers

Un constat dramatique qui peut être élargi à tout le département, l’un des pires déserts médicaux de France. À Nevers, à 40 minutes au nord-est de Decize, la situation n’est pas meilleure. Les urgences comptent six praticiens, contre 27 nécessaires. En mars, un collectif d’urgentistes de la ville tirait déjà la sonnette d’alarme, estimant que la sécurité des patients n’était "plus assurée". La pénurie est visible dans tous les secteurs de la santé : le département compte 68 médecins pour 100 000 habitants, soit presque la moitié de la moyenne nationale, à 121. On n’y trouve pas de dermatologue, et seuls 20 % des patients ont un médecin traitant. "On ne peut pas laisser les gens sans accès aux soins !", s’insurge la mairesse socialiste auprès des journalistes de France 3.

Un arrêté suivi par une vingtaine d’élus locaux

« Il est recommandé à chacun d’adopter une hygiène de vie exemplaire incluant une consommation journalière de légumes verts, des bains de soleil modérés et une absence totale de stress, particulièrement celui généré par l’état du système de santé local », préconise ironiquement le document rédigé par Justine Guyot. L’arrêté a été envoyé à l’ensemble des communes de la Nièvre, dont une vingtaine a choisi de le reprendre à leur compte.

C’est le cas de Christian Perceau, maire du village de Montigny-aux-Amognes, qui dépend des urgences de Nevers. L’édile signale aux journalistes de France 3 des "énormes soucis" avec le service, géré par l’hôpital de Dijon, qui se situe à 2 heures 30 de route. Il faut dire que la pression sur les urgences de Nevers est croissante. Depuis mars, les urgences de Decize ont déjà fermé 24 fois. En janvier 2023, un "pont aérien" avait carrément été mis en place entre Dijon et Nevers, pour acheminer des médecins.

Le 11 octobre, Justine Guyot a fait un pas de plus, en transmettant à l’ancien préfet de la Nièvre Michaël Galy une "valise sanitaire" contenant un courrier adressé à la ministre de la Santé, avec preuves à l'appui.

publié le 15 octobre à 16h05, Caroline Chambon, 6Medias.

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