Le prix du café au plus haut depuis 50 ans, victime de la sécheresse au Brésil
© Nelson ALMEIDA, AFP - Sur cette photo d'archive prise le 6 août 2015, un ouvrier sèche des grains de café biologique produits à la ferme environnementale Fortaleza à Mococa, à quelque 300 km au nord-est de Sao Paulo, au Brésil
Presque cinquante ans que le café n'a pas été aussi cher: le cours de l'arabica a atteint un sommet mercredi, essentiellement en raison de craintes grandissantes sur la récolte au Brésil, premier producteur mondial, touché par une sécheresse historique et des semaines d'incendies.
Un tel cours, jamais vu depuis des décennies, et une envolée qui concerne aussi le robusta, variété bon marché et moins aromatique que l'arabica, aura des répercussions sur les consommateurs, qui continueront, en bout de chaîne, à voir le prix de leur café augmenter.
"Il est clair et net que cela va avoir un impact important", et ce dès le début de l'année prochaine, quand les entreprises négocieront leur contrat de café, selon John Plassard, analyste chez Mirabaud.
Nestlé, qui possède Nespresso, Nescafé, ainsi que les dosettes Starbucks vendues en supermarché, avait déjà annoncé en novembre une augmentation des prix à venir et une réduction de la taille de ses sachets face à l'érosion de ses marges, rapporte l'agence Bloomberg.
Le groupe J.M. Smucker, qui possède les marques Folgers, Dunkin et Cafe Bustelo, parmi les plus vendues aux Etats-Unis, a lui déjà réalisé une première hausse de prix en juin sur certaines marques, puis une seconde en octobre sur l'ensemble de son portefeuille.
- Réchauffement climatique -
La hausse des prix est avant tout liée à l'offre en Amérique latine, mais aussi dans certains pays africains, précise John Plassard. "Les prévisions de production ne sont pas très bonnes pour les six mois qui viennent", souligne-t-il.
Au Brésil, des incendies d'une ampleur hors norme, pour la plupart d'origine criminelle selon les autorités, ont sévi pendant plusieurs semaines cet été, de l'Amazonie, au nord, jusqu'au sud du pays, favorisés par une sécheresse historique, que les experts attribuent en partie au réchauffement climatique.
Résultat: la récolte de café, dont ce géant agricole est le premier producteur et exportateur mondial, est ébranlée. Et la livre d'arabica, la plus chère et la plus vendue, a atteint mercredi à New York un record depuis 1977, à 320,10 cents.
Certes les arbres caféiers au Brésil ont profité de "pluies significatives" en octobre, après les incendies, contribuant à "une floraison exceptionnelle dans la plupart des régions productrices de café arabica", note Guilherme Morya, analyste de Rabobank.
Mais la "situation tendue des stocks au Brésil pour 2024-25 et la possibilité d'une récolte brésilienne décevante en 2025-26", si la floraison n'évolue pas comme prévue, engendrent de telles craintes que les prix ne cessent d'augmenter, ajoute-t-il.
- "Toujours prête à payer" -
D'autres facteurs, géopolitiques cette fois-ci, comme les perturbations du transport maritime en mer Rouge, les droits de douane promis par Donald Trump et les incertitudes autour du futur règlement de l'Union européenne sur la déforestation contribuent à soutenir les prix des matières premières en général, et du café en particulier.
"Dans ce contexte d'incertitude, les agriculteurs choisissent de ne vendre que ce qui est nécessaire, limitant ainsi l'offre de café sur le marché local", conclut M. Morya.
Ces craintes sur l'offre concernent aussi le Vietnam, premier pays producteur de robusta, utilisé par exemple pour le café instantané.
Cette variété, cotée à Londres, s'échange désormais autour de 5.200 dollars la tonne. Elle avait atteint mi-septembre un prix record de 5.829 dollars, du jamais-vu depuis l'ouverture du contrat actuel de référence, en 2008.
Ce prix serait même inédit depuis les années 1970, d'après Bloomberg qui s'appuie sur des archives.
Agrippé à son "latte" au lait d'avoine mercredi à la sortie d'une chaîne de café londonienne qui ne désemplit pas, Nicky, 26 ans, sait déjà qu'elle ne réduira pas sa consommation en cas de hausse des prix. "Je serai toujours prête à payer, peut-être que c'est être irresponsable financièrement", admet cette jeune professionnelle, qui se dit "accro".
Julie, 34 ans, café à la main, ne compte pas non plus abandonner sa dose de caféine. Mais elle a déjà commencé à "acheter des packs" pour tout "préparer à la maison".
publié le 27 novembre à 17h41, AFP